Lors de la création d’une société, on distingue deux moments forts : celui de la constitution de la société et celui de son immatriculation. Dans la pratique, un laps de temps les sépare au cours duquel la société, dûment constituée, attend d’être immatriculée pour pouvoir exercer son activité sociale. Puisque pendant cet intervalle, la société n’est pas encore formée, on la qualifie de société en formation.
Entrepreneurs, connaissez-vous les règles spécifiques à cette période ?
Définition de la société en formation
Dans la pratique, on considère la société comme étant en formation :
- A partir du moment où des formalités précises et univoques manifestent matériellement l’intention des fondateurs de la créer (signature ou enregistrement des statuts ; ouverture d’un compte bancaire destiné à recevoir les apports en numéraire) ;
- Jusqu’au jour de son immatriculation, date à laquelle la société est réputée formée au regard de la loi (C. com., art. L. 210-6, al. 1er ; C. civ., art 1842, al. 1er).
Durant cette période, les fondateurs sont amenés à accomplir pour la société toute une série d’actes nécessaires à sa création : souscription d’emprunts, achats logistiques, bail commercial, recrutement, etc.
Toutefois, il est impératif qu’ils s’en tiennent à des actes occasionnels visant purement à préparer l’exercice futur de l’activité sociale ; à défaut, la société pourrait être considérée comme créée de fait et privée de personnalité morale, les associés encourant alors les mêmes risques que ceux d’une société en participation (C. civ., art. 1873).
Ainsi, le respect du cadre strictement préparatoire de la société en formation emporte des enjeux majeurs pour les fondateurs. Néanmoins, un autre point mérite particulièrement d’attirer leur vigilance : le devenir des actes passés par eux au cours de cette période.
La reprise des actes par la société
Une fois formée, la société dispose de la personnalité juridique. Il lui est alors possible de reprendre à son compte les actes passés pour elle au cours de sa formation et d’ainsi décharger de leurs engagements les personnes qui avaient agi pour le compte de la société en formation.
Dans cette hypothèse, il faut distinguer trois situations :
- Les actes conclus avant la signature des statuts : devant figurer sur l’état récapitulatif annexé aux statuts avant leur signature par les associés, ils seront repris automatiquement par la société au jour de l’immatriculation ;
- Les actes conclus entre la signature des statuts et l’immatriculation : passés en vertu d’un mandat spécial donné dans les statuts ou par acte séparé à un ou plusieurs associés, leur reprise se fera également automatiquement au jour de l’immatriculation ;
- Les autres actes : lorsque les conditions précédentes n’auront pas été réunies, l’acte pourra toujours être repris par la société postérieurement à son immatriculation, sur décision expresse prise à la majorité des associés réunis en assemblée générale.
Les engagements ainsi repris seront réputés avoir été souscrits dès l’origine par la société, n’entraînant donc pas, sur le plan fiscal, le versement de nouveaux droits d’enregistrement.
Le sort des actes non repris
Si elle est fréquente, la reprise des actes par la société n’est pas pour autant systématique.
Il est ainsi possible :
- Soit, que la société ne soit finalement pas immatriculée, empêchant ainsi la reprise des actes (exemple : hypothèse de la société créée de fait, voir supra) ;
- Soit, que bien qu’immatriculée, la société ne reprenne pas certains des actes passés au cours de sa période de formation.
Dans les deux cas, les personnes ayant conclu ces actes à l’origine -fût-ce pour le compte de la société- resteront seules tenues pour l’avenir des obligations en découlant, et ce de manière solidaire si la société est commerciale. Elles deviendront alors les co-contractants définitifs des tiers et répondront, par conséquent, personnellement de l’inexécution des engagements souscrits pour la société (C. civ., art. 1843 et C. com., art. L. 210-6, al. 2nd).
En définitive, la société en formation représente une période sensible pour l’entrepreneur. Attention, donc, à ne pas la négliger lorsque vous procéderez aux formalités de création de votre société.
Nota bene : la société en formation ne peut pas faire l’objet d’une procédure collective (sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire). En revanche, la donne est différente pour l’entrepreneur qui, s’il est commerçant, sera susceptible d’être soumis au droit des entreprises en difficulté.