Blanchiments dentaires, crème anti-rides, remèdes miracles… Aujourd’hui, la majorité des revenus des influenceurs sont générés par le placement de produit. La youtubeuse Enjoy-Phoenix a révélé gagner jusqu’à 30 000 euros pour une publication Instagram et 7 000 euros pour une story (publication éphémère de 24 heures). Si ces chiffres donnent le vertige, ce n’est rien comparé aux 43 millions d’euros récoltés en 49 posts sponsorisés par le footballeur Cristiano Ronaldo ces douze derniers mois.
I. Le fonctionnement du placement de produit
Aujourd’hui, tous les influenceurs ont recours à des partenariats sur les différentes plateformes des réseaux sociaux. Cela consiste simplement à partager une photo ou une vidéo. La rémunération perçue dépend du contenu souhaité par la marque (nombre de posts Instagram, stories, vidéo sur YouTube). A cet égard, le ministre des Finances a indiqué en date du 20 mars 2019, que les paiements de ce type, que ce soit en argent ou en nature, doivent être rapportés sur une fiche.
Les contrats de placement de produit sont protéiformes, il n’existe donc pas de contrat “type”. L’imposition dépend de la qualification juridique de la prestation effectuée pour la marque. Ainsi, pour anticiper le régime fiscal applicable, il est nécessaire de rattacher ces contrats de placement de produit aux contrats déjà existants.
Ce contrat peut tout d’abord être qualifié de contrat de travail lorsqu’un lien de subordination juridique est caractérisé au regard des conditions de réalisation de la prestation. En revanche, si la relation entre la marque et l’influenceur est qualifiée de prestation de service, la rémunération ne sera pas identifiée comme un salaire.
D’autre part, lorsque la collaboration conduit à la publication d’une photo ou d’une vidéo dans laquelle l’influenceur met en avant un produit, la prestation peut être qualifiée de prestation de mannequinat en vertu du Code du travail. Dans ce cas, les revenus générés par “l’article sponsorisé” sont généralement payés directement par la marque.
Les revenus peuvent également être générés par liens d’affiliation : l’influenceur transmet un lien vers un produit avec un code. Il peut alors être payé simplement pour donner ce lien à sa communauté mais peut aussi percevoir un revenu via le nombre de commandes issues du code. Les revenus sont dans ce cadre souvent proportionnels au nombre d’abonnés.
Ainsi, les options sont multiples et se conjuguent. Outre l’attribution de produits de la marque à titre gratuit, le contrat peut prévoir une rémunération fixe (par exemple en fonction de l’audience de l’influenceur et donc son nombre de followers sur Instagram, son nombre d’abonnés sur Youtube…), une rémunération variable calculée en fonction du pourcentage de chiffre d’affaires généré, ou encore une rémunération récurrente pour une égérie…
II. La fiscalité des placements de produits
S’il s’agit d’un contrat de travail, la rémunération perçue par l’influenceur a la nature de salaire, et est donc imposable à l’impôt sur le revenu selon le barème progressif, dans la catégorie des traitements et salaires. En revanche, la rémunération perçue par le mannequin lors de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de ses présentations, qui a la nature de redevance rémunérant son droit à l’image, entre dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BOI-RSA-CHAMP-10-20-20 n°270).
Cependant, il est important de toujours avoir à l’esprit que l’argent gagné par les influenceurs sera imposé à des taux différents en fonction du barème progressif applicable à tous contribuable français. Ainsi, par exemple, la plus grosse somme qu’EnjoyPhoenix a pu percevoir pour un partenariat à long terme est de… 190 000 euros. Or, toute somme dépassant 158.122€ est imposée dans la dernière tranche d’imposition au barème progressif de l’IR, soit à 45%. Toutefois, il est fréquent que ces influenceurs mettent en place des structures sociétaires pour percevoir leurs revenus.
Les revenus peuvent également être perçus grâce à des prestations de publicité. Elles apparaissent par exemple sous forme de bannière. Le paiement s’effectue en général par un intermédiaire. Ici, l’influenceur n’est pas payé directement par la marque mais le coût sera déductible au titre de frais publicitaires, sur la base de la facture envoyée par l’intermédiaire. L’influenceur devra alors déclarer le revenu, et l’intermédiaire établir une fiche.
En ce qui concerne la déclaration fiscale, si l’influenceur omet de déclarer les sommes entrant dans l’assiette du calcul de l’impôt, il s’expose à une majoration de ses droits (10%, 40% ou 80% en fonction de la gravité de l’infraction) et l’application d’intérêts de retard de 0,2% par mois.
Comme avec l’affaire Caroline Receveur, beaucoup d’influenceurs font alors le choix d’une fiscalité hors de la France.
Finalement, on peut s’attendre à une intensification des contrôles ciblés depuis que la loi de finances pour 2020 autorise l’administration fiscale à exploiter de manière automatisée les données personnelles librement accessibles sur certaines plateformes.