La notion de “société à mission”

28 février 2021

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Suite à la loi PACTE du 22 mai 2019, le législateur a mis en place trois niveaux d’engagement distincts : 

– Un engagement obligatoire, toutes les sociétés doivent désormais être gérées dans leur intérêt social en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de leur activité [Art. 1833 du C. Civ.] ;

– Un engagement facultatif, toutes les sociétés peuvent préciser dans leurs statuts “une raison d’être” constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité [Art. 1835 du C. civ.] ;

Un engagement facultatif, certaines sociétés peuvent se prévaloir de la désignation de “société à mission”  [Art. 210-10 à 210-12 du C. Com.].

I – Définition du concept 

La société à mission n’est pas une nouvelle structure juridique, mais plutôt une qualité dont peut se doter certaines sociétés. 

Quelles sont les sociétés concernées ? 

  • Toutes les sociétés commerciales
  • Les sociétés d’assurance, les mutuelles et unions ainsi que les sociétés coopératives.

Aucune structure juridique n’est requise par les textes, ainsi la société peut être une TPE, PME, une multinationale, etc. 

II – Conditions requises 

Pour pouvoir se prévaloir du statut de société à mission, l’entreprise doit respecter les 3 conditions énumérées par l’article L.210-10 C. Com, à savoir : 

  • Ses statuts précisent une raison d’être, au sens de l’article 1835 du Code civil ; 
  • Ses statuts précisent un ou plusieurs objectifs sociaux et environnementaux que la société se donne pour mission de poursuivre dans le cadre de son activité ; 
  • Ses statuts précisent les modalités du suivi de l’exécution des missions précitées. 

III – Formalités à accomplir 

L’article L.210-10 du C. de Com. dispose que la société doit déclarer sa qualité de “société à mission” au greffier du Tribunal de commerce qui la publie au registre du commerce et des sociétés, sous réserve de la conformité de ses statuts aux conditions mentionnées aux points 1 à 3 du même article précité.

Lorsque la société acquiert cette qualité lors de sa création, elle doit l’indiquer au moment de son enregistrement au registre du commerce et des sociétés. A contrario, si elle acquiert cette qualité en cours de vie sociale, celle-ci devra faire une demande d’inscription modificative par l’indication de cette qualité. 

Il faudra également faire la demande auprès du “Centre des formalités des entreprises” de faire apparaître la qualité de “société à mission” dans le répertoire Sirène de l’entreprise. 

Dans ce cadre et afin de vérifier que l’entreprise respecte ses engagements, un mécanisme de contrôle est mis en place.

IV – Contrôle du respect des conditions 

Il s’agit d’un double contrôle, qui est effectué en interne mais également en externe par un organisme tiers à l’entreprise. 

  • Contrôle interne : Les comités de mission / Référents de mission

Comme il a été indiqué précédemment, les statuts de la société doivent prévoir les modalités du suivi de l’exécution des missions que s’est fixées l’entreprise. 

Ainsi, il doit être prévu qu’un Comité de mission qui est distinct des organes sociaux de l’entreprise et qui comporte au moins un salarié, soit chargé exclusivement du suivi de l’exécution des missions choisies.

Ce Comité doit présenter un rapport annuel, joint au rapport de gestion à l’assemblée chargée de l’approbation des comptes de la société. Ce rapport sera rendu visible au public, y compris en l’absence de communication de l’entreprise. 

Le Comité a la charge de procéder à toute vérification qu’il juge opportune et se fait communiquer tout document nécessaire au suivi de l’exécution des missions. 

Dans les entreprises qui emploient moins de 50 salariés et dont les statuts remplissent les conditions 1 et 2 de l’article 210-10 du C. Com, il est possible de prévoir dans ses statuts qu’un référent de mission se substitue au Comité de mission.

  • Contrôle externe : Un organisme tiers à l’entreprise

L’article L212-10 du C. Com. prévoit que l’exécution des objectifs sociaux et environnementaux que l’entreprise s’est fixée, fait l’objet d’une vérification par un organisme tiers indépendant. Cet organisme est soumis aux incompatibilités prévues à l’article L822-11-3 du C. Com. pour les commissaires aux comptes. 

La durée de désignation de cet organisme tiers est de 6 exercices comptables renouvelables dans la limite de 12 exercices comptables. 

L’organisme procède au moins tous les 2 ans, à la vérification de l’exécution des objectifs que s’est fixée l’entreprise. 

La première vérification doit avoir lieu au moins dans les 18 premiers mois après la déclaration au sein du registre du commerce et des sociétés.

Dans les entreprises de moins de 50 salariés ayant mis en place un référent de mission (se substituant au Comité de mission), la première vérification a lieu dans les 24 premiers mois suivant la publication au registre du commerce et des sociétés. 

De plus, lorsque l’entreprise emploie moins de 50 salariés permanents au titre du dernier exercice comptable ayant fait l’objet d’une vérification, la société peut demander à l’organisme tiers de ne procéder à la prochaine vérification qu’au bout de 3 ans.

  • L’organisme tiers délivre un avis. 

Suite à sa vérification, l’organisme délivre un avis de conformité, ou de non-conformité. 

Afin de rendre son avis, l’organisme a accès à l’ensemble des documents détenus par la société, utiles à la formation de son avis, notamment au rapport du Comité de mission / Référent de mission. 

Il procède à toute vérification sur place qu’il estime utile au sein de la société. De plus et avec l’accord de la société, il peut procéder à des vérifications au sein des entités concernées par ses objectifs sociaux ou environnementaux constitutifs des missions de la société. 

L’organisme rend un avis motivé qui retrace les diligences qu’il a mises en oeuvre et indique si la société : 

  • respecte ses missions ;
  • ne respecte pas ses missions ;
  • ne peut pas parvenir à établir une conclusion sur le respect des missions. 

En cas de non-respect ou d’impossibilité d’établir le respect des missions de l’entreprise, l’organisme doit préciser les raisons pour lesquelles, selon lui, ces missions n’ont pas été accomplies ou pour lesquelles il lui a été impossible de parvenir à une conclusion. 

L’avis motivé le plus récent est joint au rapport du Comité de mission / référent de mission, et publié sur le site internet de l’entreprise et doit demeurer accessible publiquement au moins pendant 5 ans. 

V – Conséquences en cas de non-respect des conditions requises

L’article L210-11 du C. Com. dispose que si : 

  • l’une des conditions mentionnée à l’article L.210-10 du même Code n’est pas respectée (les 3 conditions de fond et les formalités à accomplir) ; 

OU

  • l’avis de l’organisme tiers indépendant conclut qu’un ou plusieurs objectifs que l’entreprise s’est assignée ne sont pas respectés. 

Alors, le ministère public ou toute personne intéressée, peut saisir le président du Tribunal de Commerce qui statue en référé aux fins d’enjoindre, le cas échéant sous astreinte, au représentant légal de la société de supprimer la mention “société à mission” de tous les actes, documents ou supports électroniques émanant de la société. 

Outre le Ministère public et nonobstant l’absence de précision par les textes, le Comité de mission / référent de mission ou l’organisme tiers indépendant, semblent avoir qualité pour saisir le président du tribunal au même titre que le Ministère public. 

Cette suppression nécessitera une nouvelle formalité auprès du tribunal de commerce ainsi que du Centre des formalités des entreprises. 

Bien qu’aucune sanction pécuniaire ni pénale ne soit associée au non-respect des engagements pris par l’entreprise, cette dernière risque de perdre la qualité de société à mission en cas de non-respect de ses engagements. Toutefois, cela pourra avoir une certaine répercussion sur son image. 

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