Coup de projecteur sur le statut juridique des influenceurs

13 mai 2021

« Le paradoxe de la condition humaine, cest quon ne peut devenir soi-même que sous linfluence des autres. » Boris Cyrulnik 

L’avènement du numérique et l’essor des réseaux sociaux ont conduit à l’émergence d’un nouveau métier : le métier d’influenceur.  Blogueurs, Stars de télé-réalité, Youtubeurs, Instagrameurs, le métier d’influenceur tend à se professionnaliser à l’heure de l’essor du marché d’influence marketing. Dès lors, quel est le statut juridique dédié à un influenceur ?

I. Un statut juridique déterminé par la relation casuistique entre l’influenceur et la marque 

L’influenceur est une personne physique détenant un fort pouvoir de suggestion sur les consommateurs. Un influenceur expose sa vie, son quotidien, donne des conseils et effectue des placements de produits via les réseaux sociaux telles que Instagram, Twitter, Snapchat, YouTube… 

Leur apparition dans le monde du commerce a conduit certaines marques à faire évoluer leurs stratégies de communication pour se lancer dans le marketing d’influence faisant ainsi appel aux influenceurs afin de délivrer leurs messages publicitaires auprès d’un public conséquent.  

Le métier d’influenceur n’a, pour le moment, pas de cadre juridique déterminé et applicable dans toutes les situations. L’absence de statut juridique propre se justifie par l’hétérogénéité des situations qu’implique ce métier.   Ainsi, afin de voir plus clair sur le statut juridique de ces leaders d’opinion, il convient de s’interroger sur la nature contractuelle de la relation entre l’influenceur et la marque qu’il promeut. 

La relation entre la marque et l’influenceur est-elle obligatoirement régit par un contrat de travail ?  

Il n’existe pas de contrat-type régissant cette relation contractuelle. On peut ainsi s’interroger sur la possibilité de retenir le contrat de mannequin pour ce type de partenariat ? En effet, l’influenceur est appelé à devenir l’ambassadeur d’un produit et peut se voir imposer le contenu éditorial de ses publications ou la participation à certains événements organisés par la marque. Or, l’article L.7123-2 du Code du travail précise que : « Est considérée comme exerçant une activité de mannequin, même si cette activité n’est exercée qu’à titre occasionnel, toute personne qui est chargée :

1° Soit de présenter au public, directement ou indirectement par reproduction de son image sur tout support visuel ou audiovisuel, un produit, un service ou un message publicitaire ;

2° Soit de poser comme modèle, avec ou sans utilisation ultérieure de son image ».

Or, tout contrat par lequel une personne s’assure, moyennant la rémunération, le concours d’un mannequin est présumé être un contrat de travail (article L.7123-3 du Code du travail). 

Cependant, l’autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) est venue distinguer 3 types de contrats : 

  • Le contrat d’influenceur : l’ARPP le définit comme « le contrat dans le cadre duquel un individu va exprimer un point de vue ou donner des conseils, dans un domaine spécifique et selon un type ou traitement qui lui sont propres et que son audience identifie ». L’influenceur agira ainsi dans un cadre purement éditorial ou en collaboration avec une marque pour la publication de contenus.
  • Le contrat de blogueur publicitaire : il vise à promouvoir un produit, un service ou une marque ou une entreprise s’inscrivant dans le contexte de communication de l’entreprise. 
  • Le contrat de billet sponsorisé : ce contrat a quant à lui pour objet la production par un internaute d’un billet publié pour le compte de l’annonceur contre rémunération. 

Ces contrats ont pour finalité la production d’un contenu. Toutefois, lorsqu’ils ont un caractère publicitaire, ils sont soumis à des règles visant à protéger le consommateur. 

À travers ces différents types de contrat, l’influenceur fournit une prestation de services de publicité, où celui-ci met à disposition sa personnalité afin de promouvoir une marque.

Finalement, bien que nous n’avons évoqué que quatre types de contrat, l’exploitation directe de la marque de la voix, du nom et de l’image de l’influenceur fait appel à d’autres types de contrats : égérie, contrat d’exploitation des droits de la personnalité, cession de droits d’auteur,… 

À noter qu’il est courant en pratique que les marques et les Influenceurs n’établissent pas de contrat à proprement dit mais, qu’ils effectuent simplement une facture en guise de contrat, ce qui, juridiquement a la même valeur.   

II. Création d’une structure juridique dédiée

Pour pallier au flou autour du statut juridique de l’influenceur, ce dernier peut également opter pour la création d’une structure juridique dédiée. En effet, l’influenceur a le choix : 

  • Opter pour le statut de micro-entrepreneur, lui permettant de créer facilement une société. Cela s’explique par la simplification des démarches administratives et le fait que règlement des cotisations sociales et de l’impôt soient fixés en fonction du chiffre d’affaires déclaré permet facilement aux leaders d’opinion de se créer une structure juridique dédiée. Le bémol de ce statut est que l’influenceur sera soumis à un plafond annuel de chiffre d’affaires s’élevant à 72500 euros pour des prestations de service. 
  • Opter pour la création d’une structure juridique plus traditionnelle telle que l’EURL ou SASU qui permettent la déduction des frais engendrés par leurs activités lors du calcul des impôts notamment.

Ainsi, bien que l’Influenceur ne dispose pas d’un statut juridique propre  et applicable à toutes les circonstances, il a à sa disposition un panel de choix afin d’encadrer ses relations avec ses co-contractant.

* Pour en savoir plus sur la fraude fiscale des influenceurs vous pouvez consulter l’article : “ La fraude fiscale chez les influenceurs : Caroline Receveur dans l’oeil du Cyclone” *

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