L’article 214 du Code civil : la contribution aux charges du mariage.

12 octobre 2023

L'article 214 du Code civil : la contribution aux charges du mariage.

L’article 214 du Code civil énonce que « Si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives. Si l’un des époux ne remplit pas ses obligations, il peut y être contraint par l’autre dans les formes prévues au Code de procédure civile. ». Il en ressort que la contribution aux charges du mariage est une obligation pour les conjoints. Alors, comment comprendre cette obligation et comment s’exécute-t-elle ? Dans cet article, nous allons présenter l’obligation de contribution aux charges du mariage et son exécution.

L’obligation de contribution aux charges du mariage

Il convient de préciser avant tout, que l’obligation de contribution aux charges ne concerne que les couples mariés, c’est-à-dire unis par les liens du mariage.

Ce qui exclut d’emblée les relations de concubinage et les PACS (Pacte Civil de Solidarité). Les concubins et les pacsisés ne sauraient alors bénéficier du régime primaire découlant de l’article 214 du Code civil et réservé exclusivement aux mariés (Cass. 1ère civ., 19 mars 1991 ; article 515-4 du Code civil).

Contenu de l’obligation de contribution

Pour mieux comprendre l’obligation de contribution aux charges du mariage, il faut déjà commencer par définir la notion de « charges du mariage ». La loi étant muette sur la question, c’est à la jurisprudence qu’il faut se référer. Les juges ont dégagé deux approches. Les charges du mariage désignent :

  • Toutes les dépenses qui assurent le fonctionnement du ménage (dépenses de nourriture, logement, éducation des enfants, habillement, etc.) ;
  • Toutes dépenses, autres que celles ménagères prévues à l’article 220 du C. civ. (Cass. 1ère civ. 6 avril 1994).

Les charges du mariage ou charges du ménage couvrent alors un domaine plus large que celui des dépenses ménagères, qui, celles-ci sont des dépenses primaires et irréductibles du ménage.

Enfin, il faut retenir les charges du mariage comme des dépenses qui incluent celles ménagères et celles liées au train de vie du ménage.

L’obligation de contribution vise donc à pourvoir aux besoins du ménage et se distingue toutefois du devoir de secours. Celui-ci présente un caractère purement alimentaire.

S’agissant de son montant le législateur indique que chacun y contribue à proportion de ses facultés respectives. En cas de litige sur l’appréciation du montant de la part contributive de chaque époux, les juges du fond, sous le contrôle de la Cour de cassation vont évaluer la capacité contributive de chaque époux.

Par ailleurs, le législateur apporte tout de même une limite à la contribution proportionnelle aux facultés respectives des époux. Par le biais d’une convention matrimoniale, les époux peuvent aménager une répartition de leurs contributions respectives. La jurisprudence soutient que cet aménagement peut se faire dans le cadre d’un accord conclu en dehors de tout contrat de mariage. Il convient de rappeler ici que la contribution de chaque époux aux charges du mariage est une obligation d’ordre public dont aucune convention ne saurait l’y déroger (article 1388 du Code civil).

Durée de l’obligation de contribution 

En principe, l’obligation de chaque époux de contribuer aux charges du mariage perdure aussi longtemps que le mariage lui-même.

Elle prend fin à la dissolution du mariage (le divorce). C’est dire donc qu’une séparation de fait des époux n’entraine pas la suspension ou même l’extinction de l’obligation de contribution aux charges du mariage.

La communauté de vie des époux n’est pas une condition de cette obligation (Cass. 1ère civ. 6 janvier 1981 ; Cass. 1ère civ. 19 novembre 1991). Seul le divorce, qu’il soit par consentement mutuel des époux ou pas, met fin à l’obligation de contribution.

En somme, la séparation de corps des époux, qu’elle soit de fait ou émanant d’une dispense de vie commune consentie par le juge n’a aucune incidence sur l’obligation de contribution aux charges du mariage, excepté lorsque la séparation est imputable à un époux. 

Dans un arrêt du 16 octobre 1984, la Cour de cassation a admis qu’il puisse être dérogé au principe, lorsque la séparation des époux découle d’une faute imputable à l’un des époux. Celui-ci pourrait alors se voir condamner à supporter seul l’obligation de contribution aux charges du mariage (Cass. 1ère civ. 18 décembre 1978).

Exécution de l’obligation de contribution aux charges du mariage

Comment s’exécute l’obligation de contribution aux charges du mariage ? Et quelles sanctions sont prévues en cas d’inexécution ?

Modalités de l’exécution

L’obligation de contribuer aux charges du mariage s’exécuter selon des modalités bien particulières. Leur choix est toutefois laissé à l’entière discrétion des époux. L’exécution de l’obligation a lieu sous forme de contribution. De manière classique, on va distinguer trois différentes formes de contributions.

  • La contribution pécuniaire :

La contribution est pécuniaire lorsqu’elle consiste en le versement par les époux d’une somme d’argent pour pourvoir aux besoins quotidiens du ménage.

Le versement ne doit pas être unique, mais plutôt à échéance régulière (quotidien, hebdomadaire, mensuel, etc.). C’est la forme de contribution la plus répandue.

Les versements peuvent provenir de prélèvements effectués sur les ressources respectives des époux (salaires, revenus des biens propres, etc.).

  • La contribution en nature :

Est considéré comme contribution en nature, l’affectation d’un bien mobilier ou immobilier, dont est personnellement propriétaire l’un des époux, à l’usage du ménage.

Dans la plupart des cas, l’un des époux va affecter son immeuble à l’usage du ménage en guise de résidence de famille ou domicile familiale.

  • La contribution en industrie :

La contribution en industrie peut être multiforme. Il peut alors s’agir de l’accomplissement de tâches domestiques telles que l’entretien du foyer, l’éducation des enfants, etc.

La contribution en industrie peut également prendre la forme d’une collaboration à l’activité professionnelle du conjoint, dès lors que cette collaboration consiste en la fourniture d’une prestation matérielle productrice de valeur économique.

Sanction de l’inexécution

L’inexécution, violation ou non-respect de l’obligation de contribution aux charges du mariage entraine des sanctions à l’encontre de celui des époux s’en serait rendu coupable. L’inexécution peut survenir au cours du mariage ou à la dissolution du mariage.

Pendant le mariage, l’un des conjoints peut se rendre coupable de violation de son obligation de contribution aux charges du mariage.

Le législateur, à l’article 214 alinéa 2 prévoit que le conjoint fautif peut y contraint par l’autre dans les formes prévue par le Code de procédure civile. Les textes applicables dans ce cas sont :

  • les articles 1017 à 1074  du CPC, s’agissant des dispositions générales applicables à toutes les procédures familiales
  • Les articles 1137 à 1143 du CPC, s’agissant des procédures relevant de la compétence du juge aux affaires familiales.

Le contentieux est donc la compétence du JAF qui rend une décision d’exécution provisoire.

A la dissolution du mariage, le juge effectue un état des comptes des époux afin d’identifier d’éventuelles violations de l’obligation de contribution aux charges du mariage.

Trois situations peuvent être soulevées :

  • Les époux ont parfaitement contribué aux charges du mariage selon leurs facultés respectives ou selon leur régime matrimonial ;
  • L’un des époux a contribué aux charges en deçà de ses facultés ;
  • L’un des époux a contribué au-delà de sa part contributive.

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