L’état de cessation des paiements du débiteur principal justifie que le créancier puisse se tourner vers la caution. Si la caution est protégée en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde au profit du débiteur principal, sa situation se dégrade au fil des défaillances de la personne cautionnée. En effet, L’équilibre entre les intérêts de la caution et ceux du créancier est alors inversé.
L’équilibre des intérêts en procédure de redressement judiciaire
L’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire suppose que le débiteur principal soit en état de cessation des paiements (impossibilité de faire face au passif exigible avec l’actif disponible).
La procédure de redressement judiciaire a un impact significatif sur la caution. En effet, tout l’intérêt de la caution apparait dans le cadre du redressement car le créancier s’est constitué cette garantie pour que sa créance soit payé en cas de défaillance du débiteur.
Le redressement matérialise cette défaillance et justifie une protection bien moindre de la caution face aux créanciers.
Toutefois, le débiteur peut encore espérer redresser son activité. Dès lors, le créancier ne doit donc pas être totalement oubliée au profit de la caution. Il faut donc trouver un équilibre entre les intérêts de ces deux parties.
La règle de l’arrêt des poursuites et des voies d’exécution joue dans le cadre du redressement judiciaire et ce, jusqu’au jugement arrêtant le plan de redressement. Dès lors, la protection de la caution ne vaut alors que durant la période d’observation.
La règle des nullités en période suspecte a également un impact sur la caution. En vertu des articles L.632-1 et L.632-2 du Code de commerce, la nullité peut être prononcée à l’encontre d’un acte qui a été mis en œuvre entre la date d’état de cessation des paiement et celle du jugement d’ouverture d’une procédure de redressement ou liquidation judiciaire.
Dans ce cas, le créancier doit restituer les sommes qui lui ont été versées par le débiteur, parce que la nullité est une sanction rétroactive. Le paiement libératoire étant annulé, ce dernier retrouve l’entièreté de sa dette.
Par conséquent, l’obligation principale renait avec son accessoire, donc le cautionnement retrouve son plein effet.
Initialement libérée par le paiement du débiteur, la caution est de nouveau confrontée au risque de devoir garantir l’exécution de l’obligation principale. Cette règle bénéficie indirectement au créancier, qui retrouve la garantie qu’il s’est constituée malgré l’annulation du paiement.
La situation change davantage au jour de l’adoption du plan. L’état de cessation des paiements justifie que la caution ne puisse se prévaloir des délais de paiement et remises de dettes prévues dans le plan. Le créancier bénéficiant du cautionnement pourra alors se faire payer indépendamment des dispositions prévues dans le plan, parce que la caution ne peut s’en prévaloir. Ce plan n’a alors aucun impact sur la caution. Nous voyons là un aménagement du caractère accessoire du cautionnement. La caution sera tenue à plus que l’entreprise (parce que son recours contre le débiteur en redressement est souvent vain), mais parce que cette dernière est en difficulté, elle bénéficie d’aides que la caution ne peut invoquer.
Une protection presqu’inexistante en liquidation judiciaire
En procédure de liquidation judiciaire, le débiteur principal ne peut plus être sauvé et le créancier, pour être payé, n’a parfois d’autre choix que de se retourner vers la caution. Cela explique l’absence quasi-totale de protection de la caution.
Malgré le caractère accessoire de l’acte de cautionnement, ce dernier est tout de même doté d’une certaine autonomie, d’autant plus lorsque le créancier risque d’être impayé par son débiteur initial. La constitution d’une caution retrouve alors tout son intérêt. Le paiement du créancier est privilégié et la caution doit exécuter l’obligation du débiteur défaillant.
Si aucune clause contractuelle ne pouvait jusque-là soumettre la caution à une déchéance du terme, cela est désormais possible. Le jugement d’ouverture de la procédure a pour effet de rendre toutes les dettes du débiteur exigibles. Ce dernier est alors soumis à la déchéance du terme. Cela n’est pas automatique pour la caution, mais possible, ce qui aggrave sa situation par rapport aux deux procédures précédentes. La règle de l’arrêt des poursuites individuelles s’éteint définitivement dès le jugement prononçant la liquidation. La caution peut donc être poursuivie par son créancier dès lors que la procédure de liquidation a pris fin. En outre, si cette dernière se solde par une clôture pour insuffisance d’actif, les créanciers, qui ne peuvent agir contre le débiteur principal (article L.643-11, I Code de commerce), le peuvent contre la caution. En effet, cela n’éteint pas les dettes, donc la caution reste tenue au paiement de ces dernières dans le cas où elle n’aurait pas été payée par la procédure.
Nous voyons là une dégradation de la situation de la caution, qui s’explique par une aggravation de la défaillance du débiteur. Ce dernier n’étant pas en état de cessation des paiements au moment de la sauvegarde, le législateur a mis en place une protection large de la caution. Ce confort ne dure qu’un temps, puisque la cessation des paiements par le débiteur en redressement judiciaire justifie que le créancier soit protégé et puisse se prévaloir plus facilement de la garantie qu’il s’est constituée. Enfin, la caution ne saurait être protégée face à la situation irrémédiablement compromise du débiteur en liquidation judiciaire. Le législateur semble avoir trouvé un équilibre décroissant entre la protection de la caution et celle des intérêts du créancier.
Cette dégradation de la situation de la caution sera toutefois atténuée avec la réforme à venir, qui devrait amener à traiter les garants de la même manière que le débiteur soit en sauvegarde ou en redressement judiciaire.