Le détournement de fonds publics

19 février 2024

Le détournement de fonds publics

Récemment, plusieurs ex-eurodéputés ont été condamnés pour détournement de fonds publics dans les affaires des assistants parlementaires européens condamnés. Les peines allant 10 à 18 mois de prison avec sursis, 2 ans d’inégibilités avec sursis et des amendes allant jusqu’à 50 000 euros. Parmi les accusés figurent également le président du parti politique MoDem François Bayrou ainsi que ancien garde des Sceaux Michel Mercier.

Il n’est pas rare dans le monde des affaires où les sommes d’argent sont conséquentes, d’entendre parler d’abus de confiance, de prise illégale d’intérêts ou de blanchiment comme cela avait été le cas pour l’affaire Balkany.

Pour comprendre ce qu’est le détournement de fonds publics, il faut se tourner vers le droit pénal.

I. Définition de détournement de fonds publics

L’article 432-15 du code pénal prévoit et sanctionne le détournement de biens par le fait par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, de détruire, détourner ou soustraire un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés ou effets, pièces ou titres en tenant lieu, ou tout autre objet qui lui a été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission.

Jusqu’à très récemment encore, l’article 432-15 ne listait pas les personnes susceptibles de se voir reprocher le délit de détournement de fonds jusqu’à une extension des juges de la Haute Cour (Cass. Crim., 11 juill. 1018, n°18-80.264) aux parlementaires. La juridiction conclue qu’est chargée d’une mission de service public au sens de l’article 432-15 du Code pénal la personne qui accomplit, directement ou indirectement, des actes ayant pour but de satisfaire à l’intérêt général.

II. Les conditions cumulatives de caractérisation de l’infraction

Pour caractériser l’infraction, il faut réunir quatre éléments :

Premièrement, la qualité de la personne pouvant commettre le délit. Ce peut être un comptable public, un dépositaire public ou un dépositaire de l’autorité publique chargée d’une mission de service public.

En second, la nature des fonds ou des biens détournés. Il s’agit de fonds publics ou privés, bons du Trésor, espèces, chèques. Les emplois fictifs constituent également un détournement de fonds puisqu’un salaire, dont des fonds publics, est versé à l’agent pour un travail qui n’est pas réalisé.

Ensuite, un acte matériel réalisé. Le détournement consiste pour l’agent à se comporter comme le propriétaire des fonds qu’il utilise à son profit ou en fait profiter un tiers.

Et enfin un élément intentionnel. La seule connaissance du détournement par l’auteur suffit à caractériser l’intentionnel. Concernant celui-ci, il apparaît parfois difficile à caractériser. Il arrive que les prévenus soient accusés de « complicité par instigation de détournement de fonds publics » dont les modalités sont prévus à l’article 121-7 du code pénal mais il reste difficile à prouver que l’agent concernée par le délit ait eu connaissance du détournement de fonds.

III. La répression

Le délit de détournement de fonds public est puni de dix ans d’emprisonnement et d’une amende de 1 000 000 d’euros. Le montant peut être porté au double du produit de l’infraction. La peine d’amende est portée à 2 000 000 d’euros ou, s’il excède ce montant, au double du produit de l’infraction, lorsque l’infraction est commise en bande organisée.

La tentative est également punie des mêmes peines.

Des peines complémentaires peuvent également être appliquées, comme l’interdiction des droits civils et civiques et principalement l’inéligibilité pour une durée de 5 ans ou l’interdiction d’exercer une fonction publique.

IV. L’affaire des assistants parlementaires

François Bayrou était soupçonné d’être l’auteur principal d’un système frauduleux visant à rémunérer des assistants parlementaires de son parti, le MoDem, avec des fonds de l’Union européenne. Onze contrats, signés entre 2005 et 2017, d’un montant cumulé de 350 000 euros étaient dès lors dans le viseur de la justice.

Deux ont été relaxés et huit autres, dont cinq ex-eurodéputés, ont été condamnés à des peines allant de 10 à 18 mois de prison avec sursis, des amendes de 10 000 à 50 000 euros, assortis à des peines d’inéligibilité avec sursis. L’ancien garde des Sceaux écope de l’une des plus lourdes condamnations, avec 18 mois de prison avec sursis.

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