Comment la responsabilité civile des associés peut-elle être engagée ?

12 avril 2021

Comment la responsabilité civile des associés peut-elle être engagée ?

De la responsabilité civile, on retient généralement celle du dirigeant ou gérant de société. Effectivement, ceux-ci sont plus enclins à engager leur responsabilité dans la mesure où ils s’exposent davantage que les associés. Néanmoins, l’erreur serait de considérer la personne morale comme formant un écran totalement opaque préservant les associés de leurs méfaits ou négligences.

Appréciation générale des contours de la responsabilité des associés

Le contrat de société confère des droits aux associés, il leur impose cependant des obligations en contrepartie. Si toutefois elles sont en nombre limitées, elles peuvent s’avérer assez lourdes.

Outre la nécessité de réaliser des apports, les associés sont tenus par une obligation aux dettes sociales, dont l’ampleur dépend de la forme juridique de l’entreprise. En effet, il est impératif de distinguer les sociétés à responsabilité limitée aux seuls apports des associés, des sociétés à responsabilité illimitée. Dans ces dernières, une garantie légale pèse sur les associés, qui les oblige à payer subsidiairement les créanciers sociaux en cas de défaillance de la personne morale (S.N.C et Société civile). 

Se pose par ailleurs la question de la loyauté des associés. Cette notion n’est pas expressément affirmée par les textes. On remarquera cependant que l’article 1833 du Code civil prévoit que la société est « constituée dans l’intérêt commun des associés ».

D’un point de vue jurisprudentiel, le devoir de loyauté n’est pas imposé aux associés contrairement aux dirigeants et anciens dirigeants. On peut toutefois remarquer que les sociétés ayant pour objet l’exercice commun d’une profession (société civile professionnelle) ont tout intérêt à imposer une obligation de non-concurrence à leurs associés. En dehors de cette hypothèse, et sauf stipulation statutaire en ce sens, l’associé demeure libre d’exercer une activité en concurrence avec la société !

Mais alors, qu’en est-il de la mise en cause de cette responsabilité à l’égard des associés ? Rappelons qu’en droit français, la responsabilité civile est une obligation dont l’objet est la réparation du préjudice causé à autrui, soit en nature, soit par équivalent.

La question était délicate, puisque l’un des intérêts essentiels à la formation d’une société est de réduire autant que faire se peut la responsabilité des acteurs économiques. 

La Cour de cassation est finalement intervenue en transposant la théorie de la faute séparable des fonctions du dirigeant à l’associé. Elle a donc considéré que « l’associé qui commet une faute intentionnelle d’une particulière gravité, incompatible avec l’exercice normal des prérogatives attachées à sa qualité, engage alors sa responsabilité personnelle à l’égard des tiers » (Cass. Com. 18 février 2014, n°12-29.752).

Applications concrètes aux associés

La responsabilité des associés peut donc être engagée s’ils font un mauvais usage de leurs prérogatives. On pense tout particulièrement à leur droit de vote au sein des instances collectives. 

En effet, les dispositions statutaires, à défaut la loi, recourent bien souvent à la règle majoritaire. L’unanimité, quoi que plus démocratique, présente l’inconvénient majeur de rigidifier le processus décisionnel pouvant aboutir à des blocages. Toutefois, il ne faut pas que le vote majoritaire soit détourné de ses fonctions. 

Le droit de vote doit avant tout être usité pour le bien de la société, et non l’intérêt propre des associés. Loin d’une vision utopiste du monde, se pose factuellement la question de l’abus du droit de vote par les associés.

D’une part, les associés majoritaires qui prendraient une décision dans le seul but de se procurer un avantage personnel, méconnaissant l’intérêt social, commettraient un abus de majorité.

D’autre part, les associés disposant d’une minorité de blocage et empêchant la prise d’une décision essentielle pour la société, que ce soit dans leur intérêt personnel ou pour nuire aux autres associés, commettraient un abus de minorité (ou d’égalité lorsque la minorité de blocage est constituée par une moitié des associés).

Or, la loi PACTE du 22 mai 2019 est venue consacrer à l’article 1833 du Code civil une notion jurisprudentielle, à savoir que « la société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ».

Mais alors quelles sanctions en cas de manquement à l’intérêt social constitutif d’un emploi abusif par les associés de leur droit de vote ? 

Ces abus ne peuvent aboutir à la nullité des délibérations contraires à l’intérêt social. En effet, cette hypothèse ne figure pas dans les causes de nullité des actes ou délibérations des organes de la société prévues à l’article 1844-10 du Code civil

En revanche, les associés engageront leur responsabilité civile à l’égard des tiers. Par ailleurs, il est possible que la société ait subi un préjudice, auquel cas les associés minoritaires peuvent réclamer des dommages-intérêts. Ils devront alors engager la responsabilité des associés majoritaires ayant commis l’abus. Pareillement, dans le cadre d’un abus de minorité, les associés en cause peuvent se voir condamner à verser des dommages-intérêts à la société ou aux autres associés lésés.

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