L’upcycling est depuis quelques années la star du développement durable, du fait de sa manière de recycler. L’idée est de récupérer des matériaux dont on ne se sert plus, soit que ceux-ci sont abîmés ou qu’ils ne sont plus aux goût du jour. L’objectif de cette pratique est de valoriser par la récupération les matériaux ou produits non utilisés afin de les transformer en matériaux ou produits de qualité ou d’utilité supérieure.
L’upcycling au cœur du développement durable
L’upcycling dans le juridique :
L’upcycling fait son « entrée » dans le droit par l’adoption de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire du 10 février 2020. Cette loi met en avant l’économie circulaire qui est le fait de réutiliser et donner une seconde vie à des objets, comme « tendance 0 déchets ». Ce principe se trouve en parfaite contradiction avec l’économie linéaire (produire, utiliser et jeter). Ainsi, un des principaux but de cette loi est de limiter le gaspillage des produits n’appartenant pas à la catégorie alimentaire via un réemploi ou un recyclage.
Son adoption a pour but premier de contribuer à la réduction de l’usage des ressources en participant à une baisse de la demande d’énergie.
De ce fait, par son objectif principal de réduction de gaspillage, cette loi demande indirectement au secteur de la mode de repenser son modèle de fonctionnement. Tout cela dans l’optique d’impacter les invendus et éviter leur destruction (environ 5% pour le Luxe et 25% pour la Fast-fashion).
Le développement de l’upcycling :
Les maisons de luxe s’alignent avec cette loi de manière assez rapide.
En effet, Virgil Abloh en compagnie de Louis Vuitton avait sorti en janvier 2021 une paire de basket nommée les « LV trainers upcycling ». Le principe, montrer que Louis Vuitton s’insère dans une démarche philosophique éco-responsable.
Conclusions de l’arrêt CHANEL contre SHIVER AND DUKE
L’usage du symbole emblématique à titre commercial
Le principal résultat de l’upcycling découle de la créativité. Ainsi, il serait normal de voir apparaître une protection par le droit d’auteur ou la propriété industrielle sur un article upcyclé.
Il arrive dans certains cas que les pièces utilisées à des fins d’upcycling soient des pièces issues de marques de luxe. Dans ce cas se pose la question du commerce qui pourrait être perçue comme de la concurrence déloyale ou du parasitisme. C’est ce qu’il s’est produit dans l’arrêt Chanel contre Shiver and Duke.
A titre d’illustration, en droit de la propriété intellectuelle, Chanel est une marque déposée dans le monde entier, mondialement connue à la fois de ses consommateurs réguliers ou occasionnels mais également des personnes n’ayant pas les moyens de s’offrir un produit. Le dépôt de la marque fait s’en suivre, pour ses propriétaires, un monopole d’exploitation, donnant lieu à des droits sur la marque dont seuls les propriétaires peuvent se saisir afin de dénoncer une/des atteintes à leurs droits.
Ainsi, lorsqu’une personne décide d’user de logos ou de nom de marque à des fins commerciales sans accord ou contrat préalable, il est possible que celle-ci soit assignée en concurrence déloyale.
La solution retenue par le tribunal new yorkais
C’est par l’arrêt Chanel contre Shiver et Duke, que les propriétaires de Chanel ont à partir du 12 février 2021 jusqu’au classement de l’affaire le 11 octobre 2022, usés de leurs droits d’exploitation. Cet usage résulte des fondements de concurrence déloyale et contrefaçon.
Ces accusations découlent de créations issues d’un procédé d’« upcycling » usé par Shiver et Duke. Cette dernière reprenait des éléments authentiques Chanel composant une pièce de luxe usagée afin de fabriquer de nouvelles pièces. Shiver et Duke produisait principalement des bijoux fantaisie. Le tribunal New-Yorkais a dû répondre au fait de savoir si la vente d’authentique boutons Chanel transformés en bijoux fantaisie était contraire au droit des marques.
Le tribunal de New York rappelle dans un premier temps que le droit d’exploitation s’assimile en un monopole que personne, hormis le(s) titulaire(s) n’est en capacité légale d’user. Dans un second temps, le tribunal évoque le principe du transfert de propriété réalisé lors d’une vente. Par conséquent pour le tribunal, il peut sembler cohérent de pouvoir créer des bijoux fantaisies avec des boutons dont Chanel dispose de la propriété.
Ce qui peut être analysé du point de vue juridique sur la situation d’upcycling :
Principe de la contrefaçon :
Dans l’arrêt Chanel contre Shiver et Duke l’upcycling ne peut pas être considéré comme de la contrefaçon. Au sens de la propriété intellectuelle, la contrefaçon est une imitation frauduleuse ou une fabrication d’un produit sans autorisation du titulaire des droits (propriété et exploitation) donnant lieu à un préjudice à son égard.
Même si la production de produit upcyclé se réalise sans autorisation préalable, le produit fini ne peut pas s’assimiler en une imitation frauduleuse du fait qu’il puise sa base dans des produits authentiques.
Principe de la pratique commerciale déloyale et du parasitisme :
Les produits upcyclés sont plus envisageable d’être considéré comme étant une pratique commerciale déloyale voire de parasitisme que comme contrefaçon. Cela est dû premièrement au fait que la création est susceptible d’induire en erreur (confusion) le consommateur à la fois par l’origine du produit, de ses qualités substantielles, ses accessoires ou sa composition (comme un pratique commerciale trompeuse).
Également par le fait que la création d’upcycling permet aux vendeurs de se prémunir des efforts de créations, du savoir-faire ainsi que de la notoriété d’une marque sans pour autant investir considérablement.
Une protection préalable :
Juridiquement parlant, même s’il n’a pas été fait droit de la demande réalisée par Chanel, personne n’est à l’abri d’un revirement de jurisprudence. Ainsi, pour éviter d’être condamné, il est peut être préférable de demander préalablement à la moindre commercialisation un accord de la marque. Cet accord serait une protection juridique encadrée par un contrat dont le but serait d’éviter d’être assigné comme réalisant de la concurrence déloyale ou encore de se livrer à des actes de parasitisme.