Article L.145-60 du Code de commerce : la prescription biennale du bail commercial

23 mars 2023

Article L.145-60 du Code de commerce _ la prescription biennale du bail commercial

Le législateur a mentionné dans le Code de commerce les règles relatives au fonctionnement du bail commercial. Il y a également prévu un certain nombre d’actions en justice pouvant intervenir dans le cadre d’un litige entre bailleurs et locataires. L’article L.145-60 du Code de commerce précise que ces actions ont un délai de prescription de deux ans (prescription biennale). Dans cet article, nous répondons aux questions de savoir quelles actions sont soumises à la prescription biennale ? Quels sont le point de départ et les effets de la prescription ? Et enfin dans quels cas peut-on suspendre ou interrompre la prescription ?

Quelles actions sont soumises à la prescription biennale de l’article L.145-60 du Code de commerce?

Le contentieux du bail commercial peut donner lieu à de nombreux types d’actions en justice, qu’on peut reclasser en deux catégories. Les actions fondées sur les dispositions statutaires des baux commerciaux et autres types d’actions.

Particulièrement s’agissant de ces actions exercées sur le fondement du statut des baux commerciaux, l’article L.145-60 du Code de commerce dispose qu’elles « … se prescrivent par deux ans ».

La prescription biennale concerne les actions suivantes :

  • L’action en fixation du loyer du bail commercial né à l’issu d’un bail dérogatoire ;
  • En fixation du prix du bail renouvelé à l’initiative preneur (3e Civ., 20 octobre 2016. n° 15-19.940) ou du bailleur (3e Civ., 28 février 1979. n° 77-13.394) ;
  • L’action en paiement des intérêts sur les loyers payés d’avance ;
  • En fixation du loyer, de révision triennale ou de renouvellement (3e Civ., juin 1988. n° 86-14.659) ;
  • L’action en exécution d’un congé donné ;
  • En paiement d’indemnité d’occupation fondée (3e Civ., 10 mars 2004. n° 02-16.548) ;
  • En paiement de l’indemnité d’éviction reconnue par une décision de justice irrévocable (3e Civ., 18 décembre 2002, n° 01-11.189) ;
  • L’action en nullité du congé du bailleur portant refus de renouvellement de bail, avec ou sans offre d’indemnité d’éviction ;
  • L’action en réajustement du loyer principal en cas de sous-location si le loyer de sous-bail est supérieur à celui du bail principal ;
  • L’action en requalification d’une convention locative en bail commercial ;
  • En nullité du bailleur de la demande de renouvellement du preneur ;
  • L’action en requalification du bail professionnel en bail commercial.

Quels sont les effets de la prescription et son point de départ ?

Point de départ de la prescription

Le point de départ du délai de prescription peut faire l’objet de contentieux entre les parties (locataire et propriétaire) lorsqu’il n’est pas clairement défini. L’article L.145-60 du Code de commerce ne se prononce pas sur ce point, les juges de la Cour de cassation ont donc dû se prononcer sur cette question.

Il faut rappeler que la prescription consiste en l’extinction d’un droit d’agir. C’est à la partie qui invoque l’irrecevabilité d’une action d’en apporter la preuve.

La prescription court à partir du moment où le titulaire du droit à connaissance des faits lui permettant d’exercer son droit. Enfin, la règle de la prescription biennale n’est pas d’ordre public, elle est supplétive, donc les parties peuvent décider de l’écarter du contrat de bail en fixant elles-mêmes un délai de prescription compris entre 1 an et 5 ans au plus. Toutefois, le délai biennal est impératif pour les actions en paiement de loyers et charges locatives.

Voici les points départ de certaines actions en justice dans le contentieux du bail commercial :

  • Le point de départ de la prescription d’une demande de révision du loyer est la date d’expédition de la demande de révision par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR).
  • Pour une action en fixation du loyer du bail commercial né d’un bail dérogatoire, la date de départ du délai est celle de la demande d’application du statut formulée par le bailleur ou le preneur, et non celle de naissance du bail commercial.
  • Pour une action en contestation d’une clause du bail contraire au statut des baux commerciaux, le délai court à partir de la date de signature du contrat bail initial.

Effets de la prescription biennale

La prescription entraîne l’irrecevabilité de l’action et de toute la procédure engagée hors délai. C’est donc une sanction due au non exercice dans les délais de l’action en justice, elle éteint l’action et le droit y afférent.

  • En matière de réajustement de loyer, la prescription entraîne à l’égard du bailleur la perte du droit de demander le réajustement de loyer de sous-location (art. L.145-31 du Code de commerce) ;
  • En matière de fixation d’indemnité d’occupation (art. L.145-8 C. com), la prescription entraine à l’égard du bailleur l’extinction du droit de réclamer une indemnité d’occupation.
  • En matière de renouvellement, la prescription entraîne à l’égard du bailleur, la perte de son droit à une action en fixation du loyer renouvelé. Celui-ci sera alors reconduit dans les mêmes conditions que celles du bail d’origine. Le bailleur pourra toujours poursuivre son action en révision triennale du prix du bail.

Quelles circonstances peuvent entraîner la suspension de la prescription ?

En matière de prescription, le principe est que la prescription court tant qu’aucun cas ou circonstance n’y fait obstacle. L’obstacle peut être une suspension ou une interruption.

Causes de suspension de la prescription biennale

La suspension du délai de prescription interrompt sa course lors la survenance d’un incident et la relance à sa suite tout en considérant le délai déjà parcouru.

Les cas suivant suspendent la prescription :

  • Le recours à la médiation ou la conciliation ;
  • L’instruction de l’affaire avant tout procès à la demande d’une partie, jusqu’au dépôt du rapport de l’expert ;
  • La fraude du bailleur ou du locataire empêchant l’un et l’autre d’agir en justice ;
  • L’action en contestation de l’acquisition de clause résolutoire suspend particulièrement l’action en fixation des loyers.

A noter que l’action en résiliation du bail ne suspend pas celle relative au refus du renouvellement du bail, de même que celle en révision triennale légale du loyer dans certaines conditions.

Causes d’interruption de la prescription biennale de l’article L145-60 du Code de commerce

L’interruption du délai de prescription interrompt sa course dès la survenance de l’incident, et la relance à sa suite, sans tenir compte du délai parcouru. L’interruption opère un effacement du délai déjà parcouru et une remise à zéro. C’est donc un nouveau délai qui commence à courir à compter de la fin de l’acte interruptif.

Comme causes d’interruption de droit commun, on peut citer la demande en justice au fond ou en référé.

Parmi les causes d’interruption spécifiques au bail commercial, on peut citer :

  • L’assignation en validité d’un congé portant refus renouvellement avec offre d’indemnité d’éviction ;
  • La notification du mémoire préalable ou second mémoire).

A noter que n’interrompt pas la prescription, la saisine de la Commission départementale de conciliation en matière de litige portant sur le loyer de renouvellement du bail.

Cette prescription biennale de l’article L.145-60 du Code de commerce est donc à bien encadrer dès la rédaction du bail commercial.

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