À qui incombe la charge des réparations dans une location immobilière ? Cette question est fondamentale pour connaître la limite entre les charges du bailleur et celles du locataire. Dans une volonté de clarification, le législateur a distingué à l’article 606 du Code civil, les grosses réparations des charges d’entretien afin de clarifier cette répartition. L’article 606 du Code civil, ainsi que l’avènement de la loi Pinel en 2014, a apporté un éclaircissement nécessaire.
L’énoncé de l’article 606 du Code civil et son interprétation
Que prescrit l’article 606 du Code civil ?
L’article 606 du Code civil dispose : « Les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières. Celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier. Toutes les autres réparations sont d’entretien ».
L’article 605 du Code civil dispose : « Les grosses réparations demeurent à la charge du propriétaire ».
Le législateur distingue donc les grosses réparations et les réparations d’entretien. Il rappelle aussi que les réparations d’entretien sont bien à la charge du locataire.
D’ailleurs si cela concerne les locaux d’habitations, les règles s’appliquent aussi au bail commercial.
Quelle est l’interprétation jurisprudentielle de l’article 606 ?
La préoccupation majeure que pose l’article 606, c’est l’absence de définition objective de « grosses réparations ».
Cette difficulté a amené le juge à donner une interprétation de l’article 606 du Code civil.
La première principale interprétation a été donnée par la Cour de cassation dans un arrêt de la 3ème Chambre civile du 25 octobre 1983 (n°82-11-261).
Dans cet arrêt, la Cour opte pour une interprétation restrictive de l’article 606, c’est-à-dire que le juge a retenu de manière limitative la liste des grosses réparations, telles qu’énumérées par l’article 606.
Ainsi, sont considérées comme des travaux d’entretien courant en tant que réparation locatives :
- Le remplacement d’un dispositif de climatisation ;
- Le remplacement d’une chaudière.
La Cour de cassation a maintenu cette interprétation restrictive des gros travaux pendant longtemps comme l’illustre les arrêts du :
- 21 février 1996.
- 30 mai 1996.
La jurisprudence a évolué qu’à compter de 2005.
Le revirement de jurisprudence observé en 2005
L’arrêt Cour de Cassation, Chambre civile, n°04-13.764 du 13 juillet 2005
En 2005, la Cour de cassation a effectué un véritable revirement de jurisprudence en optant pour une interprétation extensive de l’article 606.
C’est notamment dans son arrêt du 13 juillet 2005, de la Chambre civile, n°04-13.764, que la haute juridiction va apporter une clarification, sur la distinction entre « grosses réparations » et « réparations d’entretien ».
- Les grosses réparations désignent alors les travaux qui intéressent l’immeuble dans sa structure et sa solidité générale, à la charge du bailleur.
- Les réparations d’entretien sont des travaux utiles au maintien permanent en bon état de jouissance de l’immeuble, ces réparations sont à la charge du locataire.
L’interprétation de l’arrêt du 13 juillet 2005
Le revirement jurisprudentiel de la Cour de cassation permet une distinction plus objective des travaux relevant des grosses réparations et ceux relevant des réparations d’entretien.
Parmi les réparations grosses, on peut notamment retrouver :
- Les travaux de ravalement de l’immeuble touchant à l’étanchéité de la façade et incluant la réfection de l’étanchéité de la totalité de la façade ;
- La réfection totale de la toiture d’un bâtiment résultant de l’usure normale ou non ;
- Les travaux réalisés pour corriger le décollement d’un mur de l’immeuble, etc.
Parmi les réparations d’entretien, on peut retrouver :
- La réfection partielle de la toiture dont la vétusté relève d’un défaut d’entretien de la part du locataire ;
- Le remplacement partiel d’éléments de toiture dès lors que les travaux ne concernent pas l’immeuble dans sa structure solide ;
- Les travaux de ravalement afin de remettre les façades en bon état de propreté.
L’apport de la loi Pinel de 2014
Publiée le 18 juin 2014, la loi Pinel a été suivie par le décret n°2014-1317 du 3 novembre 2014. Ces textes apportent un renouvellement dans les relations entre bailleurs et locataires.
Quel est l’apport de la loi Pinel en matière de travaux ?
Pour bien comprendre cet apport, il faut faire un petit examen de la situation qui prévalait avant la parution de la loi. En effet, lors de la rédaction du contrat de bail, il était possible pour le bailleur d’y inclure des clauses contractuelles qui mettaient à la charge du locataire les travaux relevant des grosses réparations.
Depuis 2014, avec l’avènement de la loi Pinel, cette pratique est proscrite.
Dorénavant, le propriétaire de l’immeuble devra lui-même, supporter les grosses réparations prévues à l’article 606 du Code civil.
Il n’y a pas de possibilité de les mettre à la charge du locataire, cette prescription est d’ordre public, toute clause contraire sera déclarée nulle.
À cet effet, le bailleur doit explicitement mentionner dans le contrat de location, les charges locatives ou réparations locatives dont s’occupe le locataire ; les parties communes de la copropriété, la caution ou dépôt de garantie, l’assurance-habitation pour les dégradations, la clause relative à la gestion d’un sinistre ou un cas de force majeure.
À la fin du bail immobilier, le locataire doit procéder à la remise en état des lieux.
Les extensions de la loi Pinel
Le Code du commerce, dans son article R.145-35, cite un certain nombre de travaux qui ne peuvent pas faire l’objet d’imputation au locataire.
Il s’agit de :
- Les grosses réparations prévues à l’article 606 du Code civil ;
- Les coûts des locaux vacants ou liés aux autres locataires ;
- Les impôts, taxes et redevances dont est redevable le bailleur.
Il est des cas où le locataire peut voir sa responsabilité engagée pour les grosses réparations.
C’est notamment le cas :
- Lorsqu’il entame des travaux sans en avoir avisé le propriétaire au préalable et que ces travaux entraînent de grosses réparations.
C’est au propriétaire-bailleur d’apporter la preuve de la faute du preneur pour être exonéré de toute responsabilité.
Si vous voulez en savoir plus, consultez ce guide sur la fiscalité immobilière.