Article 673 du Code civil : l’action en violation de propriété des arbres de vos voisins

27 novembre 2022

Article 673 du Code civil _ l'action en violation de propriété des arbres de vos voisins

Le législateur, par les termes de l’article 673 du Code civil, fixe les règles relatives à la hauteur, la taille et la distance des plantations entre voisins. Mais que faut-il en retenir ?

Le droit d’agir en cessation de toute violation de la propriété

C’est la principale déduction de l’article 673 du Code civil. Il dispose : « Celui sur la propriété duquel avancent les branches des arbres, arbustes et arbrisseaux du voisin peut contraindre celui-ci à les couper. Les fruits tombés naturellement de ces branches lui appartiennent. Si ce sont les racines, ronces ou brindilles qui avancent sur son héritage, il a le droit de les couper lui-même à la limite de la ligne séparative. Le droit de couper les racines, ronces et brindilles ou de faire couper les branches des arbres, arbustes ou arbrisseaux est imprescriptible ».

Quel est le fondement du droit d’agir ?

L’article 673 du Code civil doit être recoupé avec l’article 544 du même Code, qui consacre l’absoluité de la propriété (sous condition du respect de la loi). C’est dire donc que le droit que détient un propriétaire de s’opposer à toute emprise ou atteinte à sa propriété, sous quelles que formes que ce soit, est fondé sur les principes du droit de propriété. Droit consacré également par l’article 17 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen qui dispose « Nul ne peut être privé de sa propriété… ».

Quels sont les types d’atteintes évoquées par l’article 673 du Code civil ?

Concernant les plantations entre voisins, deux types d’atteintes sont évoquées :

  • d’une part par l’invasion des branches des arbres, arbustes et arbrisseaux du voisin sur son fonds ;
  • et d’autre part par l’envahissement des racines, ronces ou brindilles.

D’autres nuisances peuvent également être constitutives d’atteintes telles qu’une vue gâchée par la hauteur des haies ou des gouttières et toitures souillées par les déchets d’un arbre.

Que faire en cas d’atteinte au droit de propriété ?

Le droit de faire cesser toute nuisance sur sa propriété est reconnu à tous. Le propriétaire d’une parcelle peut alors les couper lui-même à la limite de la ligne séparative, si ce sont des racines, ronces ou brindilles. Il peut aussi obliger le voisin à les couper s’il s’agit de branches des arbres, arbustes et arbrisseaux.

Le propriétaire du fonds dispose ainsi d’une action en suppression des branches qui dépassent sur le fonds. Par ailleurs, les autres types de nuisances peuvent entraîner la responsabilité du propriétaire de l’arbre sur le fondement de la responsabilité extra-contractuelle et notamment par l’article 1242 du Code civil.

Quelle est la réglementation sur la distance légale des plantations entre voisins ?

Cette réglementation sur la distance obligatoire à tenir entre les propriétés des voisins admet un principe et des exceptions.

Quel est le principe ?

L’article 671 du Code civil prévoit que la disposition de toute végétation dans le voisinage doit se faire dans les limites de propriété du fonds voisin :

  • L’arbre (le tronc) doit être à 2 mètres de la limite de propriété, s’il dépasse les 2 mètres de hauteur.
  • S’il a moins de 2 mètres de haut, l’arbre ou arbuste peut être à moins de 50 centimètres de la limite séparatrice.

La limite séparative est la référence ou borne qui permet de distinguer une propriété immobilière d’une autre.

Les exceptions à l’inviolabilité du droit de propriété

Dans un jugement du 13 juin 2012, le juge a rappelé que les dispositions de l’article 673 du Code civil ne sont pas d’ordre public et peuvent faire l’objet de dérogation dans le cadre de règlements particuliers, tels que le règlement de lotissement, le plan d’urbanisme ou le plan d’occupation des sols édictés par les maires ou les préfets.

Par ailleurs, bien que l’article 672 le permette en cas de violation de l’article 671 up cit, le propriétaire d’un fonds ne peut toutefois exiger l’arrachage d’un arbre ou sa réduction à hauteur légale dans les cas suivants :

  • Le voisin dispose d’un titre l’exemptant du respect des distances légales ;
  • Les 2 terrains appartenaient jadis à la même propriété lors de la plantation de l’arbre ;
  • L’arbre en violation des distances légales date de plus de 30 ans et n’a jamais fait l’objet d’opposition (prescription trentenaire).

L’action en justice

Le propriétaire d’un bien immobilier violé par l’envahissement des branches d’arbres ou arbustes dispose d’un droit d’action en justice contre le propriétaire dudit arbre ou arbuste. Toutefois, il lui est obligatoire de faire précéder cette action en justice par un recours amiable.

Le recours amiable

C’est un préalable désormais obligatoire depuis le 1er janvier 2020. En effet, pour tout litige de voisinage, la résolution passe d’abord par une tentative de conciliation, de médiation ou une procédure participative, seules modes alternatifs retenues par les tribunaux. Le conciliateur de justice va adresser un courrier recommandé avec accusé de réception au voisin (propriétaire de l’arbre). La médiation de voisinage peut également se faire par l’entremise du maire de la commune concernée.

La solution permet de concilier les intérêts antagonistes, en convainquant le propriétaire de l’arbre d’accepter que son voisin propriétaire du fonds élague son arbre, et en permettant à ce dernier d’élaguer lui-même directement l’arbre sans passer par un recours judiciaire.

Le recours judiciaire

Il s’agit de la voie ultime, lorsque le recours amiable n’a pas abouti. C’est la méthode prescrite par l’article 673 du Code civil, qui parle de « contraindre celui-ci à les couper. ». Cette contrainte est assurée par une décision de juge du tribunal judiciaire (Article R. 211-3-8 du Code de l’organisation judiciaire). On distingue deux types d’actions :

  • L’action en suppression des branches qui dépassent la limite de propriété. Cette action laisse peu de place à l’appréciation du juge du tribunal de grande instance. Ce dernier devra alors évaluer la distance des arbres par rapport à la limite du terrain. Si cette dernière n’est pas déterminée, il faudra d’abord réaliser un bornage du terrain. Au final le juge décidera soit d’un abattage total soit d’une réduction à la hauteur légale.
  • L’action en responsabilité civile sur le fondement l’article 1242 du Code civil. Ici le juge d’instance dispose d’un large pouvoir d’appréciation. Le plaignant ou demandeur devra alors prouver le préjudice subi et le lien de causalité avec l’arbre en question. Ceci fait, le juge devra décider d’une réparation en nature ou en dommage et intérêts.

Bon à savoir :
Il est absolument proscrit de couper vous-même les branches des arbres qui surplombent votre propriété. Il faut passer par une décision du juge sous peine de dommages et intérêts (Cour d’appel de Rouen, Chambre de proximité ; 13 mars 2008).
L’action en justice pour abattage d’arbre est prescriptible au bout de 30 ans d’ancienneté de l’arbre (prescription acquisitive). Par ailleurs, l’action en justice pour élagage des branches est imprescriptible, quelles que soient les conséquences (Cour de cassation, 3e Ch. civ., 31.05.2012, n° 11-17313).
Enfin, les fruits qui sont sur les branches qui surplombent un terrain voisin appartiennent toujours au propriétaire de l’arbre. Mais lorsqu’ils tombent, ils appartiennent alors au propriétaire du sol. Cependant, il lui est interdit (au propriétaire du terrain) de les cueillir ou même de provoquer expressément leur chute (en secouant les branches de l’arbre par exemple).

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