Article 215 du Code civil : explication du logement familial


10 dƩcembre 2022



Nombre de lecture :

Article 215 du Code civil _ explication du logement familial

L’article 215 du Code civil consacre la communautĆ© de vie des Ć©poux. Il institue la notion de rĆ©sidence de la famille ou encore logement de la famille, soumis alors Ć  un choix commun et une gestion commune des deux Ć©poux. Dans cet article, le lĆ©gislateur pose certaines rĆØgles de droit civil et notamment de droit de la famille, qui connaĆ®tront alors un fort Ć©cho jurisprudentiel et doctrinal. La dĆ©termination du logement familial occupant une place importante dans sa comprĆ©hension, nous examinerons Ć©galement la mise en œuvre et les limites de sa protection.

La dƩtermination du logement familial

De prime abord, la notion de logement familial explicitĆ©e par l’article 215 du Code civil renvoie au lieu où est (principalement) Ć©tablie la famille. Mais qu’en est-il plus exactement ?

Qu’est-ce que le logement familial ?

Si le droit positif ne nous donne pas de dĆ©finition concrĆØte du logement familial, la doctrine s’est tout de mĆŖme avancĆ©e Ć  la dĆ©finir comme le lieu Ā« où se concentrent les intĆ©rĆŖts moraux et patrimoniaux de la famille Ā».

Cette dĆ©finition qui renvoie Ć  la rĆ©sidence principale, exclut par la mĆŖme occasion, la rĆ©sidence secondaire du domaine du logement familial. Position confirmĆ©e par la jurisprudence qui affirme dans un arrĆŖt Ā« qu’un immeuble qui sert de rĆ©sidence secondaire aux Ć©poux … ne constitue pas le logement familial Ā» (Cass. 1ĆØre civ. 19 oct. 1999, n°97-21.466).

Le logement familial peut changer d’un point Ć  un autre (cas du logement de fonction), sans pour autant avoir Ć  se confondre au domicile conjugal (Cass. 1ĆØre civ. 22 mars 1972, n°70-14.049).

Qu’en est-il lors d’une sĆ©paration des Ć©poux ?

L’article 215 du Code civil dispose que Ā« Les Ć©poux s’obligent mutuellement Ć  une communautĆ© de vie. Ā». Ce qui signifie que les Ć©poux partagent le mĆŖme foyer ou le mĆŖme mĆ©nage. Cependant, il peut arriver qu’ils vivent sĆ©parĆ©ment. Cela pose alors la question de la dĆ©termination du logement familial.

Deux hypothĆØses sont retenues :

  • La situation du logement familial ne change pas si l’un des Ć©poux y est toujours Ć©tabli.
  • Le juge dĆ©terminera la situation du nouveau logement de la famille si les deux Ć©poux ont quittĆ© la rĆ©sidence principale.

La protection du logement familial

Le rĆ©gime de protection du logement familial est posĆ© par l’article 215 du Code civil et consacre un principe, duquel dĆ©coulent les actes prohibĆ©s.

Le principe de la protection du logement familial

Il s’étend sur deux domaines de protection :

  • Le domaine de protection quant Ć  l’objet.

La protection du logement de la famille porte d’une part sur la rĆ©sidence principale. Ce qui exclut de fait la rĆ©sidence secondaire du domaine de la protection. D’autre part, elle s’étend aux meubles du logement. Il faut alors entendre par lĆ , selon l’article 534 du Code civil, les Ć©quipements Ā« destinĆ©s Ć  l’usage et Ć  l’ornement des appartements… Ā».

  • Le domaine de protection quant aux actes.

Quant aux actes, la protection vise d’une part Ć  encadrer le choix du logement familial, qui selon l’alinĆ©a 2 de l’article 215 du Code civil, procĆØde d’un commun accord des Ć©poux. D’autre part, la protection vise Ć  protĆ©ger le logement de la famille d’actes accomplis par l’un des Ć©poux et qui porterait atteinte Ć  l’intĆ©rĆŖt de la famille.

Cette protection consacre le statut spĆ©cifique du logement de la famille par son caractĆØre dĆ©rogatoire du droit commun des biens, et encadre ainsi l’exercice du droit de propriĆ©tĆ©, usufruit, habitation, bail, maintien dans les lieux.

Les actes prohibƩs par le rƩgime de protection

L’alinĆ©a 3 de l’article 215 du Code civil dispose que Ā« Les Ć©poux ne peuvent l’un sans l’autre disposer des droits par lesquels est assurĆ© le logement de la famille, ni des meubles meublants dont il est garni … Ā».

Deux types d’actes sont alors concernĆ©s ici :

  • Les actes de disposition du logement.

Ce sont des actes visant Ć  aliĆ©ner le logement, ou qui opĆØrent un transfert de propriĆ©tĆ©. On peut citer comme actes : la vente, donation, promesse synallagmatique de vente, vente avec rĆ©serve d’usufruit au profit d’un seul Ć©poux propriĆ©taire, actes conduisant au dĆ©membrement du droit de propriĆ©tĆ©, actes constitutif de sĆ»retĆ©s (hypothĆØque, gage). A noter ici qu’à la diffĆ©rence de l’aliĆ©nation volontaire (avec consentement des Ć©poux), l’aliĆ©nation forcĆ©e (judiciaire) Ć©chappe Ć  ce principe.

  • Les actes de gestion du logement

Ce sont des actes qui visent Ć  priver la famille de son logement. Il s’agit lĆ  d’une extension de la protection du logement familial. En effet, la jurisprudence considĆØre que certains actes de gestion ne peuvent ĆŖtre posĆ©s par un seul Ć©poux, Ć  partir du moment où ils portent atteinte Ć  l’intĆ©rĆŖt de la famille. Sont alors visĆ©s ici les actes qui rĆ©duisent les droits rĆ©els ou personnels d’un des conjoints, ou qui empĆŖchent sa pleine propriĆ©tĆ© ou jouissance sur le bien immobilier.

Les limites Ć  la protection du logement familial

La protection du logement familial admet quelques dƩrogations, notamment pour ce qui est des :

  • Actes qui n’entraĆ®nent pas l’aliĆ©nation du logement (exemple : vente assortie d’une clause de rĆ©serve d’usufruit au profit du conjoint survivant – TGI Paris, 16 dĆ©c. 1970) ;
  • Actes de disposition Ć  cause de mort ou testaments ;
  • Acte de cautionnement ;
  • Actes d’exĆ©cution forcĆ©e accomplis par les crĆ©anciers du mĆ©nage ;
  • Demande en partage.

Comment est mise en œuvre la protection du logement familial ?

La mise en œuvre repose sur le consentement des Ć©poux et la sanction en cas d’absence de ce consentement.

Le consentement des deux Ʃpoux

Il est prescrit Ć  l’alinĆ©a 3 de l’article 215 du Code civil et implique un principe de co-dĆ©cision pour tous les actes qui visent Ć  priver la famille de son logement. Une attention doit ĆŖtre accordĆ©e toutefois Ć  la portĆ©e du consentement des conjoints.

En fonction du rĆ©gime matrimonial, le consentement peut avoir valeur de Ā« simple autorisation Ā» s’il s’agit d’un bien propre Ć  l’un des conjoints, acquis avant le mariage, pour lequel il reste seul propriĆ©taire. Tandis qu’en rĆ©gime communautaire ou rĆ©gime de la communautĆ©, le consentement du conjoint prend une valeur de Ā« participation Ć  l’acte Ā», surtout pour un bien commun.

Concernant les modalitĆ©s du consentement, celui-ci n’a pas besoin d’être Ć©crit, mais il doit ĆŖtre certain et porter sur les termes mĆŖmes de l’aliĆ©nation.

La sanction Ć  l’absence du consentement : l’action en nullitĆ©

L’acte qui n’a pas reƧu le consentement des deux conjoints encourt la nullitĆ©. Ā« Celui des deux qui n’a pas donnĆ© son consentement Ć  l’acte peut en demander l’annulation Ā». Il s’agit d’une nullitĆ© relative qui ne peut ĆŖtre soulevĆ©e que par l’époux dont les intĆ©rĆŖts ont Ć©tĆ© contrariĆ©s (Cass. com. 26 mars 1996, n°94-94-13.124).

Celui-ci doit justifier d’un intĆ©rĆŖt actuel Ć  demander la nullitĆ© de l’acte.

Par ailleurs, l’action en nullitĆ© Ā« … est ouverte dans l’annĆ©e Ć  partir du jour où il a eu connaissance de l’acte, sans pouvoir jamais ĆŖtre intentĆ© plus d’un an aprĆØs que le rĆ©gime matrimonial s’est dissous Ā». Cette action est soumise Ć  des conditions de dĆ©lais et de preuves qu’il convient de maĆ®triser pour son succĆØs.

Vous n’avez pas eu la rĆ©ponse Ć  votre question ? Posez nous votre question !

Cet article vous a plu :

Formations

Pré-commande formation investissement immobilier
Pré-commande formation santé et sécurité au travail

Avocats

Par UseYourLaw

Articles / Podcasts / Webinars / Interviews de professionnels

Formez-vous avec UYL

Formation investissement immobilier
Formation Cryptomonnaies UYL
Formation santé et sécurité au travail

Derniers articles UYL

La portƩe de la clause de destination dans le bail commercial

La portƩe de la clause de destination dans le bail commercial

Dans le cadre d’un bail commercial, l’une des obligations Ć  la charge du locataire correspond Ć  utiliser les lieux conformĆ©ment Ć  leur destination. La clause de destination dans un bail commercial est donc essentielle puisqu’elle dĆ©crit l'activitĆ© ou les activitĆ©s...