L’article 1112 du Code civil : La phase de négociation contractuelle

22 octobre 2023

L'article 1112 du Code civil : La phase de négociation contractuelle

La signature du contrat est précédée d’une phase de négociation appelée phase précontractuelle. Les négociations sont la phase de préparation du contrat. C’est lors des négociations que les parties au contrat s’accordent sur les clauses futures du contrat. Avant la réforme du droit des contrats du 10 février 2016, la phase précontractuelle n’était pas régie en droit français. C’est la jurisprudence qui a ressortit des principes contractuels devant encadrer le déroulement des négociations. La réforme de 2016, ratifiée par la loi n° 2018-287 du 20 avril 2018 vient consacrer les principes dégagés par le juge. C’est à l’article 1112 du Code civil que le législateur consacre les principes directeurs de la négociation contractuelle. Sur ce, quels sont les principes qui régissent la négociation contractuelle ?

Le principe de la liberté contractuelle

Le principe de la liberté contractuelle est un sacro principe du droit des obligations. Son importance est telle qu’il déteint sur la phase précontractuelle.

Qu’est-ce que le principe de liberté contractuelle ?

La liberté contractuelle consiste en la faculté de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant, et de déterminer librement le contenu du contrat (clauses contractuelles). C’est un principe d’ordre public fondé sur la théorie de l’autonomie de la volonté. Le principe de liberté contractuelle encadre la formation du contrat, et par conséquent, sa négociation.

Il convient toutefois de noter que le principe de liberté contractuelle est limité par le respect de l’ordre public et des bonnes mœurs, comme prescrit à larticle 6 du Code civil.

Quelle est l’application du principe de liberté contractuelle dans les négociations ?

L’article 1112 alinéa 1er du Code civil dispose que :

« L’initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres. ».

Les cocontractants sont libres d’entamer les négociations afin de parvenir à la signature d’un contrat. La liberté de négocier se situe à l’initiative du contrat.

Durant le déroulement de la négociation, la liberté contractuelle permet à chaque partie la liberté de faire des propositions ou de les accepter, tout en respectant l’article 6 du Code civil.

Ce principe s’étend également à la rupture des négociations. Tant que le contrat n’est pas encore signé, les parties peuvent décider de rompre les pourparlers, c’est-à-dire de mettre un terme au projet de contrat.

Bon à savoir :

La rupture brutale des pourparlers peut entraîner des dommages et intérêts pour la partie lésée.

Le législateur préconise la liberté contractuelle dans les négociations contractuelles, ce, dans le respect du principe de bonne foi.

Le principe de bonne foi

Le principe de la bonne foi accompagne celui de liberté contractuelle. Les deux sont étroitement liés.

Qu’est-ce que le principe de bonne foi ?

La bonne foi est un principe qui sous-tend tout le processus contractuel.

Avant de l’observer dans le cadre d’un contrat en bonne et due forme, les cocontractants doivent déjà la respecter lors des négociations. Le principe de bonne foi exige que les parties soient pleinement consenties et volontaires pour contracter.

Le législateur dispose à l’article 1112 alinéa 1er que les parties « … doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi. ». Il impose donc une obligation de bonne foi dans les négociations.

Comment comprendre le principe de bonne foi dans les pourparlers ?

Tout d’abord, il faut comprendre que les pourparlers sont libres, mais soumis au principe de bonne foi. Les pourparlers libres ou négociations libres vont donc de pair avec l’obligation de bonne foi.

Il s’en déduit qu’en cas de rupture des pourparlers, la partie à l’initiative doit avoir respecté l’obligation de bonne foi.

L’obligation de bonne foi dans la rupture des négociations voudrait que la rupture soit basée sur des motifs légitimes et justifiés.

Toute rupture sans motifs valables, accompagnée d’un caractère arbitraire et brutal serait synonyme de violation à l’obligation de bonne foi et engagerait la responsabilité de l’auteur (responsabilité délictuelle).

Bon à savoir :

Lors d’une négociation contractuelle, l’obligation de bonne foi est accompagnée d’une obligation précontractuelle d’information. Cette obligation d’information contraint l’un des contractants à fournir à l’autre partie toutes les informations pertinentes. Elle concerne toutes les obligations cruciales pour éclairer le consentement du contractant.

Cependant, certaines informations sont exclues de cette obligation, comme l’information sur la valeur du bien (Cour de cassation, arrêt du 3 mai 2000). L’obligation d’information est prévue à l’article 1112-1 du Code civil.

La sanction pour faute dans les négociations

L’article 1112 alinéa 2 du Code civil dispose que :

« En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d’obtenir ces avantages. ».

Il faut comprendre que les deux futurs cocontractants se situent sur le terrain de la responsabilité délictuelle, car le contrat n’est pas encore signé. En conséquence, leur responsabilité contractuelle ne saurait être engagée.

La faute commise dans les pourparlers peut être liée à une rupture sans motif. Le juge peut donc condamner l’auteur de la rupture fautive ou rupture abusive des négociations au paiement d’une indemnité égale au montant des dépenses engagées dans le cadre des négociations.

La faute peut également découler de la divulgation sans autorisation d’informations confidentielles. Le législateur a prévu à l’article 1112-2 du Code civil, que :

« Celui qui utilise ou divulgue sans autorisation une information confidentielle obtenue à l’occasion des négociations engage sa responsabilité dans les conditions du droit commun ».

Il s’agit là d’un rappel de la responsabilité civile délictuelle prévue à l’article 1240 (ancien 1382). Il convient de noter que la faute civile délictuelle est constituée même en l’absence de clause de confidentialité ou accord de confidentialité entre les parties.

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