En droit français, une convention est un accord de volontés par lequel vous vous engagez à donner, à faire ou à ne pas faire. Les récentes évolutions sociales vous autorisent à déterminer librement le contenu de vos conventions. Mais le législateur pose une limite à cette liberté de contracter. Il dispose à l’article 6 du Code civil que « On ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs. ». Le texte soulève la question de la limite à la liberté contractuelle. Pour bien appréhender cette question, il faut déjà comprendre ce qu’est la liberté contractuelle.
La liberté contractuelle
Qu’est-ce que la liberté contractuelle ?
La liberté contractuelle est la faculté pour les contractants de contracter ou de ne pas contracter, de déterminer librement le choix du cocontractant (créancier et débiteur), et de fixer librement le contenu ou les clauses du contrat (objet du contrat, fixer le prix, conditions d’exécution du contrat, etc.).
La liberté contractuelle est un principe juridique, un principe fondateur du droit des contrats. Avant d’être repris par le législateur, le principe de la liberté contractuelle était déjà reconnu par la jurisprudence et la doctrine comme un principe fondamental du droit des obligations.
Ce principe de droit commun des contrats naît de la théorie de l’autonomie de la volonté, théorie qui associe les concepts de droits et libertés, de volonté et de bonne-foi. Elle soutient qu’une personne est tenue à un contrat parce qu’elle l’a voulu et choisi volontairement de se soumettre à des contraintes et de remplir ses obligations et d’encourir des dommages et intérêts comme sanction en cas d’inexécution du contrat (contrat de travail, contrat de vente, etc.). On parle alors de force obligatoire du contrat.
La théorie de l’autonomie de la volonté est à la base du principe de l’autonomie de la volonté, dont découle le principe de liberté contractuelle.
Quelles sont les caractéristiques de la liberté contractuelle ?
En France, le principe de la liberté contractuelle a une valeur constitutionnelle (Conseil Cons. 19 décembre 2000, n° 2000-437), celui-ci découle de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, qui dispose que « la liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ».
Le principe est également consacré à l’article 1102 al. 1er du Code civil, en ces termes : « Chacun est libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et de déterminer le contenu et la forme du contrat dans les limites fixées par la loi. ».
Trois éléments caractérisent ainsi la liberté contractuelle :
- La liberté de contracter ou de ne pas contracter ;
- La liberté de choisir son cocontractant ;
- La liberté de choisir le contenu du contrat ou encore la forme du contrat.
Bien qu’il soit conséquent à la théorie de l’autonomie de la volonté, l’article 6 du Code civil consacre certaines limites à la liberté contractuelle.
Les limites à la liberté contractuelle
La liberté de contracter n’est pas absolue. Bien que fondateur du droit des contrats, le principe de la liberté contractuelle ne signifie pas que vous êtes libre de conclure des contrats au-delà de certaines considérations et concepts socialement approuvés.
C’est ce que rappelle opportunément le législateur à l’article 6 du Code civil : « On ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs. ».
L’emplacement de cette limite à l’entame du Code civil est fort révélateur de l’importance que la société attache à la notion d’ordre public et au concept de bonnes mœurs.
La notion d’ordre public
L’article 1102 al. 2 du Code civil dispose que « La liberté contractuelle ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l’ordre public. ». Qu’est-ce donc l’ordre public ?
L’ordre public est à l’origine une notion de droit public, notamment de droit administratif. Il désigne au sens large, l’ensemble des règles édictées dans l’intérêt général et tenant à plusieurs domaines de la société.
Plus précisément, il désigne l’ensemble des règles obligatoires qu’il faut respecter dans une société dans le but de maintenir l’ordre, garantir les droits ainsi que les libertés de chaque membre de la société.
En droit des obligations, l’ordre public va davantage évoquer la licéité de l’objet et de la cause du contrat. Le contrôle du respect de l’ordre public en matière de contrat est assuré par le juge, en vertu de sa mission de salubrité sociale (TGI Paris, 8 novembre 1973).
Tout contrat ou convention doit avoir un objet licite et une cause licite. L’illicéité de l’objet du contrat ou de la cause du contrat est alors sanctionnée par la nullité du contrat. Le juge pouvant se saisir d’office.
Les mesures d’ordre public sont édictées par les lois impératives auxquelles ne peut déroger aucun contrat ou convention. Le juge joue un rôle actif dans la préservation de l’ordre public dans les contrats.
La jurisprudence a érigé de nombreux concepts et clauses contractuelles en composantes de l’ordre public des contrats :
- La dignité publique de la personne humaine, 7 octobre 1995, Conseil d’Etat ;
- Le droit au mariage, 30 avril 1963, Cour d’appel de Paris ;
- L’égalité des parties dans la désignation des arbitres, 7 janvier 1992, Cass., civ. 1ère ;
- La limite de dix ans pour la durée maximum d’une clause exclusive de fourniture, 25 mars 1974, Cass., com.
Il convient de préciser que le juge analyse l’objet du contrat dans sa globalité et non son contenu obligation après obligation.
Le concept de bonnes mœurs
Le concept de bonnes mœurs peut parfois être délicat à cerner. Il désigne l’ensemble des règles imposées par la morale et auxquelles les parties ne peuvent déroger par leurs conventions.
Il s’agit en outre des usages conformes à la moralité, la religion et à la culture d’un pays ou d’un peuple.
Le législateur a érigé les bonnes mœurs en limite de la liberté contractuelle (article 6 et 1102 du Code civil). En d’autres termes, il est interdit de conclure un contrat dont le contenu porte atteinte aux bonnes mœurs. Tout contrat doit donc avoir une cause et un objet conforme aux bonnes mœurs et à la moralité publique.
Le contrôle de conformité est également effectué par le juge.
Il convient de noter que le concept de bonnes œuvres est quelques peu abstrait, du fait que la valeur des éléments qui la constituent (moralité, religion, culture, habitues, etc.) peuvent varier d’un lieu à un autre.
De ce fait, une convention, qui en France, peut être qualifiée de violation aux bonnes mœurs, peut être toléré, voire accepté ailleurs.