L’épidémie de Covid-19 est non seulement une crise sanitaire, mais également une crise économique aux conséquences considérables. De nombreuses entreprises, plus ou moins pérennes, ont vu leur activité affectée, ce qui a également contribué à affaiblir leur trésorerie. Ainsi, des mesures ont été prises, et notamment par voie réglementaire. Elles constituent une véritable aide aux entreprises en difficulté, voire une première étape vers la transposition de la directive dite « Insolvabilité » du 20 juin 2019.
Les ordonnances Covid : une aide aux entreprises en difficulté
Depuis le début de la crise épidémique, plusieurs ordonnances ont été prises dans le but d’apporter une aide aux entreprises rencontrant, ou pouvant rencontrer, des difficultés du fait de cette crise. En voici les principales mesures :
- Ordonnance du 27 mars 2020, n°2020-341 : vient favoriser le recours aux procédures préventives et allonge des délais des procédures collectives.
Par exemple, jusqu’à l’expiration d’une durée de trois mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire, l’état de cessation des paiements d’un débiteur est apprécié à la date du 12 mars 2020. Le débiteur pourra toujours demander l’ouverture d’une procédure collective.
Il y a également un allongement des délais, notamment de la durée de la procédure de conciliation ou encore une prolongation des plans de sauvegarde et redressement.
- Ordonnance du 20 mai 2020, n°2020-596 : vient renforcer l’efficacité des procédures de prévention, mais également des procédures collectives.
Par exemple, face à un créancier appelé à la procédure de conciliation, mais qui refuse de s’y joindre, le débiteur pourra, sans qu’il n’ait été encore mis en demeure par ce créancier, demander au juge des délais de grâce sur le fondement de l’article 1343-5 du Code civil.
Le juge pourra également, pour une durée de deux ans supplémentaires au maximum, prolonger les plans sur requête du ministère public ou du commissaire à l’exécution du plan.
Il y a également institution d’un nouveau privilège dit de post money afin d’apporter une aide les entreprises en difficulté. Ainsi, les créanciers qui auront fait un apport durant la période d’observation ou pour l’exécution du plan vont être payés par privilège par rapport aux autres créanciers, et ce, dans la limite de cet apport. Il s’agit d’un privilège qui sera de rang supérieur aux créances nées après l’ouverture de la procédure collective, mais inférieur au privilège de la conciliation (ou privilège de new money).
- Ordonnance du 25 novembre 2020, n°2020-1443 : allonge principalement la durée de la procédure de conciliation qui peut être prorogée plusieurs fois, à la demande du conciliateur, sans pouvoir excéder une durée de 10 mois cependant.
Il faut donc voir, dans ces ordonnances dites « ordonnances Covid », la volonté de favoriser la prévention et la restructuration des entreprises en amont de l’ouverture d’une procédure collective. En effet, l’efficacité de la procédure de conciliation a été renforcée avec l’allongement des délais. De plus, le traitement des difficultés a également été mis en avant du fait des mesures relatives à l’allongement des délais pour les plans de restructuration que peuvent adopter les entreprises en difficulté.
Les ordonnances Covid : premier pas vers la transposition de la directive 2019/1023 du 20 juin 2019 relative à la restructuration et l’insolvabilité ?
La question se pose de savoir si les ordonnances Covid et les mesures qu’elles instaurent, pour lutter face à l’épidémie de Covid-19 et les conséquences économiques qui s’ensuivent, n’étaient pas une première étape vers la transposition de la directive 2019/1023 du 20 juin 2019 dite « Directive Insolvabilité ».
En effet, certaines mesures prises dans le cadre des ordonnances Covid semblent être destinées à se perpétuer après la transposition, en droit interne français, de la « Directive Insolvabilité ».
C’est, par exemple, le cas du privilège dit de post money précédemment évoqué. En effet, l’article 10 II de l’ordonnance du 20 mai 2020 retient que :
« Les dispositions de l’article 3, du IV de l’article 5, et celles de l’article 6 de la présente ordonnance s’appliquent aux procédures ouvertes entre la date de son entrée en vigueur et celle de l’entrée en vigueur de l’ordonnance prévue par l’article 196 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises, et au plus tard jusqu’au 17 juillet 2021 inclus ».
On retrouve ce privilège consacré similairement à l’article 17 de la directive européenne précitée.
Autrement dit, ces mesures sont applicables jusqu’à la transposition de la directive Insolvabilité qui doit intervenir, au plus tard, le 17 juillet 2021.
Au-delà de ce privilège, s’est notamment posée la question de savoir si certaines mesures instaurées par les ordonnances Covid, en plus de constituer une véritable aide aux entreprises en difficulté, n’étaient pas un préalable à la transposition de la « Directive Insolvabilité ».
En conclusion, il apparaît que les ordonnances Covid constituent une véritable aide pour les entreprises rencontrant des difficultés pendant cette période de pandémie et de crise économique. En effet, les mesures instaurées favorisent la prévention des difficultés et la restructuration des entreprises et semblent préparer le terrain en vue de la transposition de la directive 2019/1023 du 20 juin 2019 devant être transposée, au plus tard, le 17 juillet 2021. À suivre.