Le logiciel, est qualifié d’œuvre de l’esprit depuis la loi n°85-660 du 3 juillet 1985. En vertu de cette loi, il bénéficie de la protection par le droit d’auteur. Il s’agit toutefois d’une protection aménagée.
Le droit d’auteur au service de la protection du logiciel
Le logiciel, ou programme d’ordinateur, est défini comme l’ « ensemble des programmes, procédés et règles, et éventuellement de la documentation, relatifs au fonctionnement d’un ensemble de traitement de données » par l’arrêté du 22 décembre 1981 sur l’enrichissement du vocabulaire de l’informatique (JONC 17 janv. 1982). Bien immatériel, le logiciel figure à l’article L. 112-2 du Code de la propriété intellectuelle, qui lui confère sa qualité d’œuvre de l’esprit. Il est protégé par le droit d’auteur, au même titre qu’une œuvre littéraire, cinématographique ou encore qu’une base de données. Cette protection n’est conditionnée à aucun dépôt et s’applique aussi au matériel de conception préparatoire. La directive 91/250/CE (abrogée par la directive 2009/24/CE) fait office de législation communautaire. Sur le plan international, l’article 10 des accords ADPIC (1994) et l’article 4 du traité OMPI WCT (1996) consacrent la protection du logiciel par le droit d’auteur.
Cette protection est soumise au respect des critères jurisprudentiels de forme et d’originalité. Le critère d’originalité renvoie à l’empreinte de la personnalité de l’auteur. En matière de logiciel et depuis un arrêt marquant de la Cour de cassation réunie en Assemblée plénière du 7 mars 1986 (numéro du pourvoi 83-10.477), ce critère d’originalité s’illustre par un « effort personnalisé » du concepteur, portant « la marque de son apport intellectuel » et allant au-delà des impératifs techniques liés à la conception du logiciel. Cette jurisprudence est confirmée à de multiples reprises par le juge français, qui consacrera la notion de choix dans l’appréciation de l’originalité du logiciel. Ainsi, l’empreinte de la personnalité du concepteur de logiciel peut être caractérisée « à partir des choix possibles qui lui sont offerts » (Paris, 23 octobre 1998, Expertises 1999, p 31). Ce qui est à retenir ici c’est que les considérations techniques ou pratiques ne sont pas révélatrices d’une quelconque originalité de la part de l’auteur. De ce fait, les fonctionnalités en tant que telles (Versailles, 9 octobre 2003, Microsoft c/ Synx Relief) ne permettent pas de caractériser l’originalité du logiciel.
Le critère de forme exigé par le juge français corrobore la directive européenne 2009/24/CE qui indique dans son considérant n°11 que « seule l’expression d’un programme d’ordinateur est protégée ». De cette façon, « les idées et principes qui sont à la base de la logique, [les] algorithmes et [les] langages de programmation » ne sont pas protégés par le droit d’auteur. Le matériel de conception préparatoire est protégé au titre de l’article L. 112-2 du CPI et il est mentionné dans le considérant n°7 de la directive précitée. L’objectif des législateurs français et européens est de protéger chaque étape de la conception du logiciel. A pu ainsi être protégé un ordinogramme (Cass. civ. 1Ère, 17 février 1977, Cotraba c/ Clauzier).
Soumise au régime du droit d’auteur, la protection du logiciel bénéficie toutefois de certains aménagements qui lui sont propres.
Une protection adaptée aux spécificités du logiciel
D’un point de vue des prérogatives morales et patrimoniales, le droit d’auteur relatif au logiciel est amoindri par le législateur. Tout d’abord, notons qu’en vertu de l’article L. 121-7 du CPI, l’auteur d’un logiciel ne bénéficie ni du droit de repentir ni du droit de retrait sur son œuvre. Seuls les droits de divulgation et de paternité subsistent. Le droit d’exploitation attaché au logiciel bénéficie d’un article qui lui est consacré (art L. 122-6 du CPI) dans lequel sont notamment détaillées la reproduction, la traduction ou encore la mise sur le marché du logiciel. Des exceptions à ce droit sont formulées dans l’article L. 122-6-1 du même code. Complexe, cet article est justifié par les impératifs techniques assortis au logiciel. Celui-ci est une œuvre qui n’a pas vocation à s’envisager isolément. Autrement dit, la modification du logiciel doit être permise et la résolution des erreurs et anomalies doit être facilitée. L’accès au code source est donc nécessaire. Ainsi, à condition de respecter le « test en trois étapes » posé par la Convention de Berne, la personne ayant obtenu le droit d’utiliser le logiciel peut par exemple, sans autorisation de l’auteur, réaliser une copie de sauvegarde ou effectuer tout acte « nécessaire » pour l’utilisation du programme. Cet appauvrissement des droits de l’auteur au profit d’une collaboration entre concepteurs et d’une libre circulation de l’information est notamment incarné par le mouvement du logiciel libre, créé par Richard Stallman.
La protection du logiciel par le droit d’auteur peut paraître insuffisante en ce qu’elle n’existe vraiment que contre la copie littérale du code source ou du code objet. C’est notamment pour cette raison que la protection du logiciel par le brevet a pu être envisagée. En effet, le programme d’ordinateur semble posséder toutes les caractéristiques permettant sa brevetabilité. Celle-ci est toutefois exclue par le Code de la propriété intellectuelle (art L. 611-10). Il convient cependant de soulever que les pratiques de l’OEB ont permis de breveter le logiciel lorsque celui-ci créé un « effet technique supplémentaire » allant au-delà des « interactions physiques normales » entre le programme et l’ordinateur.