Depuis plusieurs années, les enjeux environnementaux et les inquiétudes relatives au réchauffement climatique occupent une place croissante. En témoigne d’ailleurs la militante écologiste s’étant introduite le 3 juin 2022 sur les terrains de tennis de Roland-Garros afin d’alerter sur le fait que “We have 1028 days left” (“il nous reste 1028 jours”).
Si la transition écologique tend à devenir un objectif d’avenir incontournable, il demeure toutefois complexe de mener l’ensemble des Etats Européens à s’inscrire dans ce mouvement. Tel est pourtant l’un des projets ambitieux de l’Union Européenne : établir un droit européen des sociétés “plus vert” d’ici 2050.
Comment le droit européen des sociétés tend-il à prendre en considération les enjeux environnementaux ?
Dès le 10 mars 2021, le parlement européen adoptait une résolution appelant la commission européenne à proposer une directive spécifique relative au devoir de vigilance vis-à-vis des filiales, des sous-traitants et des fournisseurs. Cette dernière ambitionnerait de contraindre les entreprises à prendre des mesures effectives de prévention et d’atténuation des risques d’atteinte aux droits humains et à l’environnement tout au long de leur chaine de valeur. Par ailleurs, le parlement préconise de permettre d’agir en justice en cas de manquement.
La commission européenne a alors publié, le 23 février 2022, une proposition de directive relative au devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité. Celle-ci impose alors à ces dernières de mettre en oeuvre des moyens destinés à s’orienter progressivement vers une économie et des sociétés durables.
Ce texte constituerait donc une véritable avancée et innovation du droit européen des sociétés. En effet, les motifs de la proposition énoncent “le comportement des entreprises dans l’ensemble des secteurs économiques est essentiel pour réussir la transition de l’Union vers une économie verte et neutre sur le plan climatique, conformément au pacte vert pour l’Europe, et pour atteindre les objectifs de développement durable des Nations Unies. Pour cela, les entreprises doivent mettre en oeuvre des processus complets visant à atténuer les incidences négatives sur les droits de l’homme et de l’environnement, intégrer la durabilité dans leur système de gouvernance et de gestion d’entreprise”.
Pour ce faire, la proposition de directive prévoit de créer des obligations de moyens à la charge des sociétés, assorties d’une responsabilité juridique en cas de manquement.
Le champ d’application de la proposition de directive européenne relative au devoir de vigilance
Le champ d’application de la proposition de directive viserait d’abord, en vertu de l’article 2.1, “les sociétés (banques, fonds d’investissements, compagnies d’assurance etc…) établies au sein de l’Union Européenne qui emploient plus de 500 salariés et réalisent un chiffre d’affaires net de plus de 150 millions d’euros”. Par ailleurs, un seuil spécial concerne les sociétés présentant un risque climatique élevé, ces dernières étant tenues d’une obligation de vigilance renforcée. Enfin, une dérogation permet à la proposition de directive de s’appliquer y compris aux sociétés hors de l’union mais ayant une activité importante en son sein.
Cependant, l’application de cette directive ne saurait se faire sans réserve. En effet, l’article 22 prévoit que les entreprises seront tenues responsables, et sanctionnées, selon deux conditions cumulatives.
- Il convient d’une part que l’entreprise ait manqué à son obligation d’ “identifier, éviter, atténuer, mettre fin à une atteinte grave à l’environnement et aux droits de l’homme” ;
- Et d’autre part que cette défaillance ait causé un dommage.
Ainsi, la proposition de directive semble ambitieuse et pertinente au regard de l’avènement du développement durable. Il convient alors de se demander si celle-ci sera suffisante pour mener les entreprises des 27 états membres de l’union à s’y conformer.