Podcasts : auteurs contre plateformes de diffusion, quelles solutions juridiques ?

23 juillet 2021

Podcasts : auteurs contre plateformes de diffusion, quelles solutions juridiques ?

Plus de 200 000 podcasts ont été produits par an depuis 2018 dans le monde. A l’ère du replay et de l’accès de plus en plus large à l’information, c’est le contenu audio qui se met à la page. Les podcasts proposent un renouvellement certain du champ médiatique en instaurant un temps plus long dans l’accès à l’information, évitant ainsi le beach hearing d’informations brèves et superficielles. Cependant si la création de ces podcasts connait une croissance certaine, l’appréhension juridique de celui-ci est loin d’être parfaite. Favoriser la création de ces podcasts tout en régulant juridiquement le secteur est la problématique dont devra s’emparer le droit français notamment.

I/ Une définition peu aisée 

Le podcast provient étymologiquement de la contraction de différents mots : iPod, sur lequel le podcast s’est d’abord développé, et de broadcasting (diffuser en anglais). L’objectif du podcast est de diffuser et accéder à des contenus numériques sous format audio ou encore vidéo. Le podcast se différencie ainsi de la radio en ce qu’il n’est pas écouté simultanément à sa diffusion et est accessible à tout moment. Il diffère également des plateformes audios à la demande. On le voit, le podcast se trouve à la frontière de médias déjà connus tout en ayant des spécificités qui l’empêchent d’intégrer des catégories connues.

Ces enjeux de définition ne sont pas, comme souvent, sans conséquences sur la manière dont les podcasts sont régis en droit français ou européen. En effet, les podcasts, dans l’angle mort des catégories juridiques connues, ne connaissent pas de régime fixe : ils ne sont que très rarement visés par les mesures de régulations connues dans l’audiovisuel. En comparaison avec la radio, la déclaration auprès du CSA, les enjeux de régulation du marché de l’audio à la demande par le droit de la concurrence ne touchent pas les podcasts.

II/ Les relations contractuelles entre éditeur et plateformes de diffusion

La complexité des podcasts réside notamment dans les relations contractuelles utilisées en pratique. Souvent produits par des éditeurs de service radios, ceux-ci donnent accès aux podcasts sur un site de replay par exemple. Ensuite, des plateformes tierces peuvent récupérer ces podcasts et les publier sur leur propre site internet. 

En effet, certaines plateformes recueillent ces podcasts produits par des radios, puis les organisent sur une plateforme entièrement dédiée. Cependant des conflits peuvent apparaître. Radio France par exemple estime qu’une autorisation doit être accordée pour mettre à disposition ces podcasts, en vertu de l’article 216-1 du Code de propriété intellectuelle, A l’inverse, les portails de référencement estiment que le référencement de podcasts sur une plateforme n’est pas une « communication au public » mais la simple mise à disposition d’un lien hypertexte qui est volontairement mis à disposition par l’éditeur, en se prévalant de la jurisprudence Svensson de la CJUE. 

L’argument consistant à opposer que des icônes sont mises en ligne avec ces podcasts, que les liens sont bien souvent classés et non pas seulement cités pourrait cependant être avancé. 

Dès lors, le podcast s’inscrit pleinement dans les débats classiques du droit d’auteur. Ce domaine du droit semble pouvoir épouser les contours poreux du podcast. 

III/ Le contrat comme instrument de souplesse dans le temps 

La grande originalité du podcast se ressent également dans l’instabilité contractuelle qui existe entre les organismes de gestion collective défendant les auteurs et les plateformes de diffusion. Un modèle économique fragile aboutit à des relations contractuelles procédant par tâtonnements et qui gagneraient fortement à intégrer des mécanismes de révision contractuelle. C’est donc l’arme contractuelle qui doit être utilisée par les auteurs et leurs représentants pour pouvoir obtenir l’exploitation la plus avantageuse financièrement, de leur répertoire, selon l’évolution du modèle économique et de ses exigences.

Finalement, si le podcast reste une forme d’œuvre spécifique, il s’inscrit dans les schémas déjà connus des œuvres audiovisuelles. Ainsi, bien que son modèle d’exploitation reste encore à définir du fait du caractère relativement récent de sa démocratisation, les auteurs et les éditeurs ne sont pas dépourvus de clés pour faire valoir leurs intérêts économiques et juridiques. Le Code de la Propriété intellectuelle et la liberté contractuelle, par leur souplesse, sont autant d’instruments qui permettent de faire juridiquement face à l’attrait des plateformes pour les podcasts. On reconnaît ici comme ailleurs l’ingénieuse rédaction des différents textes législatifs initiaux.

Pour plus d’information, un rapport a été établi par l’Inspection Générale des activités culturelles : « L’écosystème de l’audio à la demande (« podcasts ») : enjeux de souveraineté, de régulation et de soutien à la création audionumérique » en octobre 2020. (https://www.culture.gouv.fr/Espace-documentation/Rapports/L-ecosysteme-de-l-audio-a-la-demande-podcasts-enjeux-de-souverainete-de-regulation-et-de-soutien-a-la-creation-audionumerique )

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