Les piliers du dispositif anticorruption de la loi Sapin 2 en entreprise

6 janvier 2021

Les piliers du dispositif anticorruption de la loi Sapin 2 en entreprise

La loi Sapin 2 du 9 décembre 2016 a permis l’introduction en droit français d’un corpus de règles anticorruption. Celles-ci s’appliquent dans les sociétés ou groupes de sociétés dont le siège social est en France, ayant un effectif comprenant 500 salariés et plus et dont le chiffre d’affaires (consolidé ou non) est supérieur ou égal à 100 millions d’euros. Les dispositions de la loi Sapin 2 assurent la mise en place d’un dispositif anticorruption, qui repose désormais sur trois piliers indissociables.

Premier pilier du dispositif anticorruption : l’engagement de l’instance dirigeante

La loi Sapin 2 impose aux instances dirigeantes des sociétés d’assurer leur mission avec probité. Le législateur attend des personnes placées à la tête de l’organisation et chargées de la gérer d’avoir un comportement exemplaire (en paroles et en actes) en matière d’intégrité et de probité. Ces derniers doivent également promouvoir personnellement le dispositif anticorruption, mettre en oeuvre les moyens suffisants pour que celui-ci soit effectif et efficace, et s’y conformer pour ses propres décisions. Enfin, elles doivent s’assurer que les sanctions prononcées en cas de comportement contraire au code de conduite soient adaptées et proportionnées. 

Finalement, les instances dirigeantes doivent instaurer une politique de tolérance zéro en matière de corruption. Elles doivent également diffuser et faire connaître cette politique et la démarche anticorruption afin de toucher l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise. De plus, des ressources propres doivent être allouées pour la mise en place dudit dispositif, cela passe notamment par la nomination d’un responsable de programme compliance. En outre, ces engagements anticorruption doivent être mesurés, afin de valoriser les réalisations positives, mais aussi d’identifier les axes d’amélioration. Enfin, ces engagements doivent être sincères pour assurer une pleine efficacité des dispositions de la loi Sapin 2, sans quoi ceux-ci n’auraient aucun intérêt (si ce n’est faire du greenwashing).

Second pilier du dispositif anticorruption de la loi Sapin 2 : la cartographie des risques 

La loi Sapin 2 impose l’élaboration d’une cartographie des risques, permettant ainsi de connaître les risques de corruption auxquels l’entreprise est exposée. Pour Charles Duchaine, directeur de l’Agence française anticorruption, il s’agit du point le plus important de la loi Sapin 2, car « établir la cartographie, c’est poser le problème. Le reste, la mise en oeuvre des obligations, c’est répondre au problème ».

La cartographie des risques est la véritable pierre angulaire du dispositif anticorruption mis en place par la loi Sapin 2. Son fondement définit l’ensemble des mesures de prévention et de détection des risques. Cela se traduit par la compréhension et l’évaluation des risques d’atteintes à la probité auxquels est exposée l’entreprise, ainsi que la mise en place de mesures et procédures adaptées et proportionnées afin de les maîtriser. 

S’agissant de la forme de la cartographie des risques, les dispositions de la loi Sapin 2 sont claires : il s’agit « d’une documentation régulièrement actualisée et destinée à identifier, analyser et hiérarchiser les risques d’exposition de la société à des sollicitations externes aux fins de corruption ». 

Troisième pilier du dispositif anticorruption de la loi Sapin 2 : la gestion des risques

La conception, le déploiement et la mise en oeuvre du dispositif anticorruption de la loi Sapin 2 s’articulent autour des risques identifiés dans la cartographie. Les mesures et procédures du dispositif ont pour but de prévenir les risques, les détecter et remédier aux insuffisances constatées. 

S’agissant de la prévention des risques, la loi Sapin 2 prévoit la mise en place d’un code de conduite (et ses procédures annexes), ainsi que la sensibilisation et la formation des salariés aux risques d’atteintes à la probité et l’évaluation de l’intégrité des tiers. 

S’agissant de la détection des risques, la loi Sapin 2 impose la mise en place d’un dispositif d’alerte interne permettant de recueillir les signalements émanant des collaborateurs, relatifs à l’existence de conduite ou situations contraires au code de conduite de la société. Elle impose également un dispositif de contrôle et d’audit interne adapté et proportionné aux risques d’atteintes à la probité auxquels elle est exposée. De plus, les insuffisances constatées, notamment durant les contrôles réalisés, permettent de définir des mesures correctives, pouvant s’inscrire dans le cadre d’un plan d’action. La loi Sapin 2 impose également la conservation et l’archivage des mesures et procédures, ainsi que leur méthode d’élaboration. 

Conclusion : 

La lutte contre la corruption apparaît comme le véritable fer de lance de la compliance. La loi Sapin 2 permet ainsi à la France de rattraper son retard sur les États-Unis (dotés du « FCPA » depuis 1977) et le Royaume-Uni (doté du « UK Bribery Act » depuis 2010) dans cette matière. 

Les dispositions de la loi Sapin 2 s’inscrivent dans une tendance globale de sensibilisation et de responsabilisation des entreprises, par la mise en place de mesures et procédures lourdes ainsi qu’un contrôle à posteriori. Dans ces conditions, même les TPE et PME ont un intérêt à s’attarder sur ces problématiques (d’autant plus que le dispositif du lanceur d’alerte intéresse également les entreprises dont l’effectif est supérieur à 50 salariés). 

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