Évoquer la situation économique actuelle du continent africain conduit nécessairement à penser le niveau de pauvreté très élevé, le taux élevé de corruption ou encore une situation démographique inquiétante. Cependant, tout comme le Président Emmanuel Macron l’a indiqué lors de son discours aux ambassadeurs le 29 août 2017 : « C’est en Afrique que se joue largement l’avenir du monde. ».
Penser l’Afrique, ce n’est pas seulement se cantonner à une vision alarmante du continent. Penser l’Afrique, c’est également faire référence à ses ressources minières, agricoles, ou climatiques. Penser l’Afrique en 2021, c’est imaginer une terre d’avenir. Le phénomène d’ouverture des économies nationales sur un marché mondial lie le sort du continent africain au reste du monde. Ainsi, pour que l’Afrique puisse devenir à son tour un vaste marché économique et un pôle de développement, l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA), s’est donnée pour mission d’harmoniser le droit des affaires en Afrique. Créée le 17 octobre 1993 par le Traité de Port-Louis, cette organisation internationale a pour vocation de poursuivre une intégration juridique entre les différents États membres. Ses objectifs sont de faciliter les échanges et les investissements, garantir la sécurité juridique et judiciaire des entreprises et des différents investisseurs.
Il est alors pertinent de se demander en quoi l’harmonisation du droit des affaires en Afrique permet-elle réellement la facilitation des échanges et des investissements sur le continent africain ?
I. Le continent africain : terre d’avenir ?
La situation actuelle du continent africain ne laisse en rien entrevoir que l’Afrique sera le continent de demain. Et pourtant, l’Afrique pourrait bien être le continent sur lequel se joue l’avenir des investisseurs.
Plusieurs facteurs laissent à penser que l’investissement sur les terres africaines permettra, d’une part, de faire de l’Afrique un marché économique attractif et compétitif et, d’autre part, de participer à l’accroissement de l’économie mondiale.
D’une part, l’Afrique, du fait de la perspective de croissance économique, peut être qualifiée de terre d’avenir. En effet, le continent fait partie des régions du monde les plus prometteuses. Selon le rapport Bloomberg, agence de presse américaine spécialisée dans la finance et l’économie, sept des dix pays à la plus forte croissance économique en 2020 sont des pays africains. Et ce, malgré l’impact désastreux de la pandémie de la COVID-19 sur l’économie mondiale.
D’autre part, les terres africaines sont connues pour leurs quantités importantes de ressources naturelles. Des pays comme la République démocratique du Congo, le Niger, l’Afrique du Sud, regorgent de ressources naturelles premières, comme le cobalt, le gaz, le pétrole ou l’uranium. Prenons l’exemple de la République démocratique du Congo, 60 % de l’extraction mondiale du Cobalt s’effectue dans ce pays. Rappelons, que ce métal est particulièrement essentiel aux créations de smartphones, ordinateurs ou encore des voitures électriques.
Enfin, le continent africain dispose de multiples secteurs ouvrant des opportunités aux investisseurs, qu’ils soient nationaux ou étrangers. Infrastructures, banques, formations ou encore les différentes technologies de l’information et de la communication, ouvrent les portes à de nombreuses perspectives d’investissements et au développement de nouveaux modèles d’économie.
En résumé, la situation actuelle du continent n’est pas une fatalité pour l’Afrique. Elle regorge de nombreuses ressources, qu’elles soient démographiques, climatiques ou encore naturelles. Ces dernières laissent entrevoir un avenir pour les investisseurs et pour le continent. Cependant, les investissements ne sont possibles que si les investisseurs ont confiance dans leur investissement. Et c’est en cela, que l’OHADA s’engage à garantir la sécurité pour les entreprises et les investisseurs, en passant par une harmonisation des droits.
II. L’harmonisation du droit des affaires : la garantie d’une sécurité juridique pour les investisseurs
Par l’OHADA, les États signataires ont voulu démontrer leur volonté de contribuer à l’œuvre d’instauration d’un espace économique unifié et apte à répondre aux différentes attentes des investisseurs, qu’ils soient nationaux, régionaux ou encore internationaux.
Le but de cette harmonisation des droits est de palier aux contradictions créées par les multitudes de lois discordantes, et au contenu parfois obsolètes des lois déjà en vigueur (ex : certaines coutumes africaines). Les objectifs sont : harmoniser et mettre à jour le droit des affaires, afin de faire du droit africain des affaires, un droit propice à l’économie et aux investissements.
La situation judiciaire et juridique actuelle du continent africain a contribué à l’imprévisibilité des lois et des décisions judiciaires. Des facteurs qui sont pourtant essentiels dans la construction de la confiance accordée par les investisseurs.
Ainsi, l’OHADA a fait de la sécurité juridique et judiciaire, la pierre angulaire de la construction d’un système juridique unifié en Afrique. Le besoin d’investissements pour le développement du continent, passe donc par une reconstruction du droit axé sur des principes communs entre les différents États.
L’harmonisation du droit des affaires apparaît donc comme la garantie d’une sécurité juridique et judiciaire pour les entreprises comme les investisseurs. Rappelons que la sécurité juridique, dans le prisme du droit français, est un principe à valeur constitutionnelle (Cons. Cons. 16 décembre 1999) visant à assurer la connaissance du droit applicable et la stabilité juridique.
Intelligibilité et simplicité du droit sont donc les maîtres mots de cette intégration juridique. Cette simplicité du droit passe par l’accessibilité et la sécurité de ce droit. Accessibilité, car le droit OHADA a pour objectif de créer un droit uniforme et commun entre les différents États membres. Ainsi, les investisseurs ne seront pas confrontés à un mille-feuille normatif et aux conflits de lois incessants.
De plus, cette prévisibilité du droit passe par une interprétation jurisprudentielle commune entre les différents États. Cette interprétation étant l’œuvre de la Cour commune de justice et d’arbitrage. L’article 14 du Traité OHADA dispose ainsi : « La Cour commune de justice et d’arbitrage assure l’interprétation et l’application communes du traité ainsi que des règlements pris pour son application, des actes uniformes et des décisions. »
Par cette harmonisation du droit, l’organisation internationale assure ainsi, l’intelligibilité de l’architecture juridique pour les entreprises et investisseurs. Pour donner l’exemple de la réussite de cette intégration juridique, ce processus d’harmonisation a permis à l’unification de nombreux droits entre les différents États : en matière commerciale, en droit de l’arbitrage, en droit des sociétés ou encore en droit des procédures collectives.
En résumé cette intégration juridique participe ainsi à la construction d’une plus grande confiance des investisseurs dans le système juridique africain. Confiance qui conduit naturellement à une augmentation des investissements et au développement de l’économie du continent.
Cependant, ce propos reste à nuancer, dans la mesure où cette intégration juridique est une antinomie à l’idée de souveraineté nationale. En effet, l’intégration régionale passe par l’aliénation d’une partie de la souveraineté pour les États membres. Celle-ci pouvant être considérée comme étant une perte de la marge de manœuvre. Limitant ainsi l’action des États sur certaines problématiques.