Le lobbying, s’il est ordinaire aux Etats-Unis, demeure un usage encore flou en France, qui se pratique « sous le manteau », laissant planer une menace pour la démocratie du pays.
En 1901, l’adoption de la loi « relative au contrat d’association », met fin aux restrictions du décret d’Allarde et de la Loi Le Chapelier qui avaient aboli les corporations. Pour autant, l’extrême réticence du peuple pour ces groupes n’a pas été dissipée depuis. C’est la société Michelin, qui semble avoir ouvert la voie du lobbying en France. Désireuse de vendre des cartes pour les automobilistes, elle a sollicité auprès de l’administration la numérotation des routes, catégoriquement contre au départ, mais qui après une longue campagne de lobbying a fini par céder.
En définitif, les lobbyistes n’ont pas pour projet un bouleversement du système législatif. Ils souhaitent seulement l’accommoder à leurs intérêts, influençant les décideurs publics sur certains points spécifiques de la réglementation. Mais ces changements ne sont pas toujours d’une faible portée juridique…
Le législateur en définissant les représentants d’intérêt (I), marque sa volonté d’encadrer l’activité de lobbying, en les soumettant à certaines obligations. (II)
I – Le lobby, quelle définition légale ?
La loi du 9 septembre 2016, dite Sapin II, n’a pas défini précisément la notion de lobbyiste. Elle se contente, dans son article 25, d’énumérer les différents types de « représentants d’intérêt » et ceux qui ne le sont pas.
La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), dégage ainsi trois conditions à remplir pour être qualifié de représentant d’intérêt :
- Être une personne physique ou une personne morale (de droit privé ou de droit public) ;
- Représenter des intérêts, et contacter – en ce sens – des décideurs publics afin de les influencer dans leurs décisions ;
- Exercer cette activité de façon principale ou régulière.
Quant aux partis politiques, aux élus dans l’exercice de leur mandat ainsi que les organisations syndicales de salariés comme d’employeurs, ils en sont écartés.
II – Vers une repression du lobbying ?
Les représentants d’intérêt au sens de la loi Sapin II, ont été soumis à différentes obligations afin de garantir la transparence de leurs rapports avec l’administration, sous peine de lourdes sanctions.
– Des obligations déclaratives
La loi Sapin II a remplacé le registre public des représentants d’intérêt crée en 2009, par le répertoire numérique national des représentants d’intérêt.
Depuis l’été 2017, les lobbyistes sont tenus de transmettre à la HATVP, dans les trois mois suivant la fin de leur exercice comptable, certaines informations : identité (ou identité de leur dirigeant), champ des activités de représentation d’intérêt, actions d’influence opérées auprès de décideurs publics et montant des dépenses liées à celles-ci. (Loi n°2013-907 du 11 octobre 2013, art. 18-3 ; Décret n° 2017-867, 9 mai 2017, art. 3).
– Des obligations déontologiques
D’autre part, l’article 18-5 de la loi du 11 octobre 2013 exige des représentants d’intérêt, de faire preuve de « probité et d’intégrité » dans l’exercice de leur activité.
Outre l’obligation de communication de leur identité à la HATVP, cette exigence passe surtout par un comportement éthique à adopter et le respect de certaines règles déontologiques. Ainsi, il leur est interdit de proposer ou remettre des présents, dons ou avantages d’une valeur significative à un responsable public ; de verser une rémunération à un responsable pour qu’il prenne la parole dans un colloque ou une réunion ; d’essayer d’obtenir des informations par des moyens frauduleux ou encore de vendre des informations ou des documents provenant d’un responsable public.
La Haute Autorité, tenue de la gestion du répertoire numérique, vérifie les informations transmises ainsi que le respect de la déontologie imposée par la loi. En cas de manquement, elle doit adresser une mise en demeure, qui peut être publique. Les représentants d’intérêt ignorant la loi, encourent une amende pouvant aller jusque’à 15 000 euros et un an d’emprisonnement. Le président de la HATVP – Didier Migaud – a fait entendre son souhait d’être doté d’un pouvoir de sanction propre, lors d’un entretien avec Le Monde en juillet 2020. Cela permettrait, comme pour une majorité d’autorités administratives indépendantes, de gagner du temps et de l’efficacité, sans pour autant se substituer au juge pénal.