La question de la mobilité géographique du salarié se pose tant du point de vue de l’employeur, que de celui du salarié. L’employeur peut-il modifier le lieu de travail d’un salarié ? Ce dernier est-il tenu d’accepter toute modification de son lieu de travail ?
En présence d’une clause de mobilité
Les conditions de validité d’une clause de mobilité
Sous réserve de recueillir le consentement de l’employeur et du salarié, les parties peuvent intégrer au jour de la conclusion du contrat de travail, ou ultérieurement, une clause de mobilité dans le contrat de travail. Il est nécessaire que la clause soit expressément inscrite dans le contrat de travail et qu’il y ait eu acceptation par le salarié (Cass. soc., 19 novembre 1997, n° 95-41.260).
La clause de mobilité doit mentionner de manière précise la zone géographique de la mobilité et ne pas permettre à l’employeur d’en étendre unilatéralement la portée. De telle sorte, qu’au jour où le salarié signe le contrat, il connaisse l’étendue de son engagement.
Par exemple, les juges ont considéré qu’une clause qui couvre l’ensemble du territoire français est suffisamment précise et ne permet pas à l’employeur d’en étendre unilatéralement la portée, (Cass. soc., 9 juillet 2014). A contrario, une clause indiquant que la zone géographique d’activité est l’Alsace-Lorraine et qu’elle pourra être étendue si l’activité s’étend n’est pas suffisamment précise et permet à l’employeur d’en étendre unilatéralement la portée (Cass. soc., 7 juin 2006, n° 04-45.846). Les juges ont également restreint une clause stipulant qu’elle s’appliquait « dans tous les établissements de la société » aux seuls établissements existant au jour de la signature du contrat (Cass. soc., 12 mai 2004, n° 02-40.018).
Les conditions de mise en œuvre de la clause de mobilité
L’existence à elle seule de la clause de mobilité ne permet pas à l’employeur de la mobiliser de manière discrétionnaire. Il doit respecter des conditions lors de sa mise en œuvre.
La mise en œuvre de la clause ne doit s’effectuer que dans l’intérêt de l’entreprise (Cass. soc., 23 janvier 2002, n°99-44.845) et de bonne foi.
La bonne foi contractuelle étant présumée, il incombe au salarié de démontrer l’absence de bonne foi, ou la mise en œuvre étrangère à l’intérêt de l’entreprise (Soc. 23 février 2005, 04-45463).
La bonne foi contractuelle exige de l’employeur qu’il respecte un délai de prévenance suffisant (Cass. soc., 18 septembre 2002, n° 99-46.136). Mais également qu’il prenne en compte le droit au respect de la vie personnelle et familiale du salarié. Par exemple, il ne peut imposer à un salarié un déplacement immédiat, alors même qu’il avait connaissance de la situation familiale critique d’un salarié, et que la tâche pouvait être pourvu par d’autres collègues (Cass. soc., 18 mai 1999, n° 96-44.315).
Enfin, l’employeur ne peut activer la clause de mobilité, si sa mise en œuvre entraîne une modification du contrat de travail du salarié, à l’instar de rendre une partie de sa rémunération provisoire (Cass. soc., 3 mai 2006).
En l’absence d’une clause de mobilité
En l’absence de clause, les juges ont construit la notion de secteur géographique.
Une mutation à l’intérieur du secteur géographique emporte simple modification des conditions de travail et permet à l’employeur de modifier le lieu de travail du salarié.
Le secteur géographique s’apprécie de manière objective, en prenant comme critère la distance, le temps de travail et les moyens de transport entre l’ancien lieu de travail et le nouveau (Cass. Soc., 15 décembre 2010).
La jurisprudence n’ayant pas posé de définition plus précise, la notion de secteur géographique relève de l’appréciation souveraine des juges. Elle s’apprécie donc au cas par cas.
Pour exemple, a été considéré comme faisant partie d’un même secteur géographique un nouveau lieu de travail distant de 43 kilomètres et desservi par les transports en commun (Cass. soc., 16 novembre 2010). Ou encore a été considéré comme faisant partie d’un secteur géographique différent des lieux de travail se situant en région parisienne et en région de l’Avesnois (Cass. soc., 13 déc. 2007, no 06-44.912).
En conclusion :
En présence d’une clause de mobilité, sous réserve du respect des conditions de validité et de mise en œuvre, l’employeur peut imposer au salarié tout lieu de travail se situant dans la zone géographique contractuelle. Le refus du salarié sera considéré comme fautif.
En l’absence d’une clause de mobilité, l’employeur peut imposer au salarié tout lieu de travail se situant dans le secteur géographique. Le refus de changement du lieu de travail dans ce secteur est considéré comme fautif. A l’inverse, le refus du changement du lieu de travail en dehors du secteur constitue une modification du contrat de travail et nécessite l’accord du salarié. Le refus ne peut être fautif.
Attention : la notion de zone géographique s’applique uniquement à la clause de mobilité et la notion de secteur géographique en l’absence de clause.