La métamorphose de la valeur économique de l’influenceur lors du dépôt de sa propre marque

10 décembre 2021

La métamorphose de la valeur économique de l’influenceur lors du dépôt de sa propre marque

Afin d’ancrer les relations qui les unissent avec leur communauté respective dans le temps, les influenceurs développent leurs propres marques, ces dernières leur permettant de développer leur propre merchandising. L’obtention de cette marque va permettre aux influenceurs de promouvoir dans le cadre d’une action commerciale ou d’une campagne de publicité leur marque ainsi que celle d’une entreprise, c’est ce qu’il convient de nommer le co-branding.

I. L’influenceur, titulaire de sa propre marque

Si de nombreux influenceurs ne s’interrogent pas au sujet du droit, certains d’entre eux sont entourés et conseillés, notamment par les agences d’influenceurs. Les influenceurs ont une valeur économique non négligeable dû à leur notoriété. Pour rentabiliser leur notoriété et protéger leur nom, nombreux d’entre eux décident de déposer leur pseudonyme à titre de marque. Les dénominations sous toutes leurs formes peuvent constituer un signe distinctif appropriable par un droit de marque.


Cette catégorie compte par ailleurs les mots, assemblages de mots, noms patronymiques ou encore pseudonymes. À titre d’exemple, constitue une marque valide le pseudonyme « Johnny Hallyday ». Parmi les influenceurs cités dans ce mémoire, et après études de la base de l’INPI (Institut national de la propriété industrielle), il est possible d’affirmer qu’Inoxtag et que Léna Situations ont tous les deux déposé leur pseudonyme à titre de marque. Les influenceurs vont plus loin, et créent leurs propres marques. En juillet 2019, Squeezie lance avec son frère une marque de vêtements streetwear baptisée Yoko qu’il propose sur sa boutique Yokoshop. D’autres proposent des accessoires ou jeux de société. Amazon a même mis en place une plateforme de création de produits dérivés clé en main sans avoir à avancer de frais. Certains influenceurs déposent des marques et décident de commander des produits sur Aliexpress, d’y apposer leur logo, et d’investir dans un ré-emballage digne de ce nom. C’est la technique dite du dropshipping, ou l’art de tromper légalement en affaires, souvent reproché aux influenceurs, qui trompent ainsi leur abonnés en oubliant ceux qui les ont mené au succès. C’est notamment ce qui est reproché à l’influenceuse Cholé Blinc pour sa marque « Maison Dorée ». Chloé achèterait ses bijoux sur Aliexpress pour les revendre trois fois leur prix.

Au-delà du droit des marques, le parasitisme économique peut-être un rempart pour que l’influenceur protège sa notoriété. La jurisprudence définit le parasitisme comme « l’ensemble des comportements par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit sans rien dépenser de ses efforts et de son savoir-faire ». Concernant des faits de parasitisme économique sur youtube, le tribunal judiciaire de Paris a rendu une décision le 24 janvier 2020. Afin de se faire connaitre sur Youtube, et d’accéder à la monétisation de ses vidéos, une youtubeuse a utilisé le nom d’une autre chaine Youtube dans les titres et les descriptions de ses vidéos. Estimant que les références systématiques à sa chaîne relevaient d’un comportement parasitaire, la société gestionnaire de la chaine concurrente l’a assignée en concurrence déloyale. Le tribunal judiciaire de Paris a considéré que cet acte était « indiscutablement » parasitaire en raison de l’intention de vouloir tirer profit du nom de cette chaine Youtube notoirement connue.

II. Le co-branding entre association bénéfique et confusion pour les marques

Les influenceurs disposent donc de leurs propres marques, et deviennent, pour les entreprises, presque une sorte de concurrent dont il faut se méfier. Choisir de s’associer à un influenceur dans le cadre d’un co-branding, c’est permettre à la marque de s’associer à l’influenceur, et de le faire participer à son histoire. La communauté de l’influenceur sera davantage incitée à acheter le produit, parce que ce dernier va participer à sa création et en assurer la promotion. Pour l’entreprise, les influenceurs représentent une audience cible donnant accès à un nouveau marché.

Toutefois, les co-créations avec les marques restent minoritaires, elles concernent seulement 8% des créateurs de contenus. Néanmoins 59% d’entre-eux désireraient réaliser ce type de collaboration car la co-création est un partenariat à forte valeur ajoutée. La co-création représente une stratégie d’extension pour la marque de l’influenceur comme de l’entreprise.

Le co-branding peut également être nommé publicité associative, car il consiste en une communication associant plusieurs marques. L’objectif est de créer un nouvel univers en associant deux images de marque ou alors de créer un nouveau produit commun. Il existe plusieurs types de co-branding.

Premièrement, les deux marques s’associent à travers une communication réalisée ensemble. Ils regroupent leurs ressources afin de participer à une campagne publicitaire. C’est le cas de l’association « Léna Situations x Adidas ». En devenant égérie de la marque, Léna situations apporte sa touche de positivité aux trois bandes. Disponible depuis le 19 mars 2021, elle a développé en collaboration avec la marque une ligne de vêtements.

Deuxièmement, le co-branding peut être une co-dénomination. La marque du concepteur est une marque d’accueil qui va inviter une seconde marque, la marque invitée sur un ou plusieurs produits. C’est le cas de Benefit Cosmetics (marque d’accueil) qui a consacré un « coffret à sourcils » en association avec « Enjoy Phoenix » (marque invitée), marque de l’influenceuse Marie Lopez. Ce coffret rassemble les six incontournables de Benefit choisis par cette dernière.

Dernièrement, le co-branding peut se traduire par la réalisation d’un produit commun entre la marque d’une entreprise et la marque de l’influenceur. Ils travaillent conjointement à l’ensemble du processus : de la réalisation à sa promotion comme à sa vente. À titre d’exemple, L’Oréal et l’influenceuse Sanaa El Mahalli de son pseudo « Sananas », titulaire de la marque « Sananas » ont créé de concert un gel douche Dop au parfum barbe à papa. Dans une vidéo Youtube, elle présente à sa communauté comment elle a participé à la création de ce gel douche, du choix de la fragrance au processus de fabrication.

Le co-branding a des limites car il est susceptible de créer une confusion dans l’esprit du consommateur. Il sera considéré comme déloyale, s’il est imposé par une marque à une autre, et qu’elle porte atteinte au titulaire de cette marque. Ainsi, un revendeur non agréé par la marque qui apposerait sa marque sur un produit d’une marque préexistante sera considéré comme une publicité déloyale. De même, il n’est pas possible d’utiliser l’image d’un influenceur qui ne consent pas à l’opération marketing, cette publicité sera considérée comme déloyale car elle porte une atteinte à l’image d’une personne physique non consentante.

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