Depuis plusieurs mois, les deux principaux acteurs télévisuels français, les groupes TF1 et M6, ont entamés des négociations exclusives afin de fusionner d’ici 2022. L’idée derrière cette fusion serait de faire front commun face à la concurrence des plateformes de streaming.
Créant un danger de concurrence monopolistique au niveau des parts du marché de la publicité, cette fusion va faire l’objet d’une enquête menée par l’Autorité de la concurrence en septembre prochain.
I – La nécessité pour les groupes télévisuels historiques de s’unir face à la concurrence du streaming
Tout d’abord, une fusion-acquisition est un terme désignant la transmission universelle du patrimoine d’une société vers une autre société, qui absorbe l’ensemble des actifs et passifs de la société acquise. On parle même dans le cas de la fusion des groupes TF1 et M6 d’une fusion-absorption car il ne sera laissé aucune individualité juridique au groupe M6, le but étant de former une super-entité pour reprendre du terrain sur les auditeurs des groupes de streaming.
Après cette fusion, prévue pour 2022, le nouveau groupe TF1-M6 devrait représenter trois milliards de chiffre d’affaires et près de 70% du marché français en ce qui concerne le publicité audiovisuelle, dans l’objectif de regagner du terrain face aux plateformes de streaming telles que Netflix et Disney+.
Cette fusion entre géants de l’audiovisuel, bien qu’il s’agit d’une première en France, n’est pas une technique nouvelle pour redynamiser des groupes de divertissement, comme le montre, dans le sens inverse, le rachat de la Fox par Disney pour 72 milliards de dollars.
II – Une fusion soulevant une problématique de concurrence monopolistique au sein de l’univers télévisuel français
Les règles sur la concurrence sont évidemment très importantes, il s’agit de laisser une chance à tous les acteurs d’un milieu, éviter qu’un seul écrase tous les autres. En ce sens, c’est l’article 102 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne qui régit la situation dans l’Union européenne, plus précisément, cet article vient interdire les abus de positions dominante qui seraient le fait d’entreprises, pour reconnaitre ledit abus il faut réunir les conditions d’une position domaniale vis à vis du marché intérieur ainsi qu’un abus de position. Généralement, la Commission détermine une situation de position dominante par la détention, par une entreprise, d’un pouvoir de marché qui vient restreindre la concurrence sur ce même marché. Le respect de cet article sera assuré par l’Autorité de la concurrence et le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel.
Le réel problème soulevé par la fusion est donc un éventuel monopole sur les recettes publicitaires par l’entité TF1-M6. Les précédents jugements de la Cour de Justice de l’Union Européenne nous ont démontré que posséder plus de 50% des parts d’un marché était un indice suffisant pour caractériser un abus de position dominante, là où les prévisions pour TF1-M6 serait de 70% des parts du marché.
Ces constats méritent d’être nuancés, en raison de nouveaux acteurs que sont les GAFAM. En effet, même si l’hégémonie de la nouvelle entité est incontestable, si on compare les revenus de ses parts de marché à ceux de Google par exemple, on peut voir que le géant de la recherche a enregistré 2,5 Milliards de bénéfices via des recettes publicitaires en France, soit autant que TF1 et M6 réunis en 2020. Il est donc un peu tôt pour évoquer une réelle concurrence monopolistique une fois que la nuance est faite vis à vis des géants du streaming.
III – Vers une intégration des plateformes de streaming dans le domaine de la concurrence ?
Le streaming prend de plus en plus de place dans le paysage audiovisuel français, comme le montre l’exemple très récent d’Amazon qui a racheté les droits de diffusion (et donc de publicité) des matchs de la Ligue 1 de football. Mais, comme l’a précisé Isabelle de Silva, présidente de l’Autorité de la concurrence : « Le développement des plateformes comme Netflix ou des acteurs comme Google ne peut pas conduire à justifier toutes les fusions possibles ». Une réponse plus précise sera donc fournie quand l’Autorité de la concurrence rendra sa décision avant la date prévue pour la fusion, rendez-vous en 2022 !