Indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse : comment échapper au barème Macron ?

5 août 2021

Indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse : comment échapper au barème Macron ?

Avant les ordonnances du 22 septembre 2017, dites ordonnances Macron, lorsqu’un licenciement était jugé sans cause réelle et sérieuse (c’est-à-dire un licenciement dont le salarié a injustement été victime, qu’il n’aurait pas dû subir), il revenait librement au juge de fixer le montant des indemnités allouées au salarié. Suivant l’ancienneté de celui-ci et les conditions plus ou moins mauvaises du licenciement, le montant des indemnités pouvait s’avérer très variables, et parfois trop haut au goût de certains employeurs. Également, certaines juridictions pouvaient se montrer plus ou moins généreuses, suivant la région où le litige se déroulait.

I. Qu’est-ce que le barème Macron ?

Afin de plafonner les indemnités jugées trop élevées ou encore trop différentes d’une juridiction à l’autre, le barème Macron a pour objectif de « normer » les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. De cette manière, suivant l’effectif de l’entreprise et l’ancienneté du salarié injustement licencié, le barème donne une amplitude du montant d’indemnité pouvant être versé au salarié.

Par exemple, au sein d’une entreprise comptant moins de 11 salariés, un salarié comptant deux ans d’ancienneté peut prétendre à une indemnité comprise entre un demi et 3,5 mois de salaire brut, ce qui pour certain, peut paraître peu à l’égard d’un salarié licencié à tort, à fortiori au regard de la situation économique actuelle.

II. Contourner le barème Macron en dépassant le cadre du licenciement sans cause réelle et sérieuse

Comme il n’est donc pas apprécié de tous, le barème Macron cherche donc à être contourné autant que possible quand il est question de la défense des salariés.

Pour se faire, l’une des techniques consiste à dépasser le simple grief de licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d’aller sur le terrain de la reconnaissance d’un harcèlement moral, sexuel ou encore d’une discrimination. La reconnaissance d’un de ces trois cas de figure permet de ne pas se voir appliquer le barème Macron, et d’obtenir alors des indemnités dépassant les plafonds du barème.

Cette stratégie justifie aujourd’hui que de plus en plus de dossiers présentés devant les Conseils de Prud’hommes comporte un volet d’accusation de harcèlement à l’égard de l’employeur, et plus rarement de discrimination.

Mais comme avec le vent vient la tempête, la multiplication des griefs de harcèlement et de discrimination à l’égard des employeurs ne fait que renforcer les exigences de preuve sur ces sujets, déjà demandeurs d’importants éléments de preuve.

C’est pourquoi la défense de certains salariés comporte également, ou alternativement, une autre voie de contestation du barème Macron, portant directement sur le barème lui-même.

III. Droits fondamentaux internationaux au service du contournement du barème

Ainsi, certains ont développé une argumentation attaquant le barème lui-même, notamment aux regards de textes internationaux.

            Pour cela, l’argumentation consiste a invoqué le principe de légalité, selon lequel chaque norme juridique doit se conformer à l’ensemble des règles en vigueur ayant une force supérieure dans la hiérarchie des normes. De l’invocation d’un tel principe, il est logique de rappeler que l’article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 indique que : « Les Traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois ». Cela signifie donc qu’un certain nombre de textes, européen ou mondiaux, une fois ratifiés, c’est-à-dire acceptés par la France, sont plus importants que la loi française.

De même, il est important de préciser que le contrôle de la conformité des lois par rapport aux conventions internationales (contrôle de conventionnalité) appartient aux juridictions ordinaires sous le contrôle de la Cour de cassation et du Conseil d’État. Ce contrôle peut donc conduire, lors de l’examen d’un litige, à écarter la loi française pour faire prévaloir la convention internationale dans la résolution du litige.

Ainsi, étant donné que l’article 10 de la convention OIT n°158 sur le licenciement, ratifiée par la France le 16 mars 1898 (dont le Conseil d’Etat a confirmé l’effet direct dans la décision CE Sect., 19 octobre 2005, CGT et a., n° 283471), stipule que si les tribunaux « arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n’ont pas le pouvoir ou n’estiment pas possible dans les circonstances d’annuler le licenciement et/ou d’ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée », et que la charte des droits européen reprend le même raisonnement, admis par certaines juridictions internes, (Conseil de prud’hommes de Nevers le 26 juillet 2019, n°18/00050, et le même jour celui de Pau, n°18/00160, Conseil des prud’hommes de TROYES, par jugement de départage du 29 juillet 2019, n° 18/00169, ou encore Le Conseil des prud’hommes du HAVRE, par jugement du 10 septembre 2019), ces textes internationaux semblent donc permettre de contourner le barème Macron.

Ainsi, cette méthode de contournement du barème consiste à dire que le barème Macron ne permet pas un droit à une indemnisation adéquate du salarié injustement licencié exigé par les textes internationaux, et par conséquent, il est possible pour le juge d’écarter le barème Macron dans le cas d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de fixer librement le montant de l’indemnisation, sans plafond d’indemnités.

Ce raisonnement, technique et fin, n’est cependant pas toujours reconnu par les juges.

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