Avec la croissance rapide du marché mondial et de la concurrence internationale, il était primordial d’assurer la protection des droits des travailleurs. L’évolution du commerce international ne devait pas avoir de conséquences négatives sur le plan social et la protection des droits fondamentaux de l’Homme au travail. Le droit international du travail est là pour une mondialisation durable avec l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour garantir une sécurité juridique.
I- Le droit international du travail : promouvoir une justice sociale.
L’Organisation internationale du Travail (OIT) est une agence spécialisée de l’ONU qui a vu le jour en 1919 et qui a pour objectif d’encourager la justice sociale comme on peut le constater dans le préambule de la Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail et son suivi adopté en 1998. Elle est la source du droit international du travail, avec les conventions et les recommandations élaborées par l’organe législatif de l’OIT, la Conférence Internationale du Travail. Ces normes, dès qu’elles sont ratifiées par les Etats membres, sont applicables en droit interne.
Ces normes priment sur le droit national comme on peut le voir avec le Conseil des Prud’hommes de Longjumeau, 28 avril 2006. Le tribunal avait estimé que l’ordonnance de 2005 qui avait créé le contrat nouvelle embauche (CNE) était contraire à la Convention 158 de l’OIT imposant un motif et une procédure de licenciement pour rompre un contrat. D’ailleurs, les Etats membres doivent régulièrement rendre un rapport sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution de l’OIT).
La Déclaration de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable, adoptée en 2008, vient renforcer la compétence de l’OIT pour un travail décent. En effet, l’économie mondiale est en évolution constante mais cela ne profite pas à tout le monde surtout suite à la crise de 2008. C’est pour cela que l’OIT veut promouvoir et permettre à chacun un travail décent et le respect des droits des travailleurs.
Pourtant les Etats membres n’ont aucune obligation de ratifier ces conventions mais ils doivent tout de même “respecter, promouvoir et réaliser, de bonne foi et conformément à la Constitution, les principes concernant les droits fondamentaux qui sont l’objet desdites conventions” (§ 2 du préambule de la Déclaration de l’OIT de 1998). Donc les déclarations de l’OIT ne relèvent pas du droit impératif mais il faut une sécurité juridique et c’est là que l’OMC joue un rôle important.
II- L’OMC : la garantie d’une sécurité juridique.
Avec l’évolution des normes internationales sur le travail, le juge de l’OMC ne pouvait pas rester spectateur. De plus, le travail est lié au commerce international. Ainsi, l’Organe d’Appel (OA) en interprétant les conventions internationales va permettre au juge de l’OMC d’agir. En effet, selon l’ article 31 § 3-c de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 “ il sera tenu compte, en même temps que du contexte, de toute règle pertinente de droit international applicable dans les relations entre les parties” pour interpréter un traité.
En effet, le juge va prendre en compte que les Etats faisant partie à l’OMC sont aussi membres de l’OIT et donc les principes de la Déclaration de l’OIT de 1998 vont être appliqués aux Etats membres de l’OMC. Ceci est possible du fait qu’un principe “ne s’impose au juge de l’OMC que si ce principe figure dans un traité multilatéral liant au moins tous les membres de l’organisation, ou s’il appartient à la sphère de droit international général”.
Avec cette interprétation, le juge de l’OA peut agir dans le domaine du droit international du travail comme par exemple le travail forcé et le travail pénitentiaire dont il va faire une interprétation en se basant sur des textes de l’OIT.
L’OIT définit le travail forcé à l’article 2 § 1 de la convention n° 29 sur le travail forcé (1930) : “aux fins de la présente convention, le terme “travail forcé obligatoire” désignera tout travail ou service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de son plein gré”. En ce qui concerne le travail pénitentiaire, pour éviter d’être dénoncé comme du travail forcé, “il doit être exécuté sous la surveillance et le contrôle des autorités publiques” et le travailleur carcéral ne doit pas être “mis à disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées”.
Le juge ne va pas différencier le travail forcé du travail pénitentiaire mais incorpore le travail forcé dans le travail pénitentiaire comme ce fut le cas avec la Chine dans les camps de rééducation jugés comme du travail forcé et non du travail carcéral. Pourtant la Chine n’a pas été sanctionnée alors que plusieurs experts (BIT, CISI) ont démontré la présence de travail forcé.
Le droit international du travail évolue avec le commerce international. L’objectif des organisations internationales est de permettre à tout le monde de profiter de cette prospérité et de garantir les droits des travailleurs mais ce n’est pas chose facile face aux puissances mondiales. Pourtant il est dans l’intérêt de la communauté internationale de respecter les normes internationales du travail. Comme le disait Michel Hansenne “la libéralisation du commerce international et le progrès social doivent aller de pair”.