Suivant l’arrêt précurseur en la matière (Cass. soc., 20 déc. 2001, n° 00-12.916), il ressort que les éléments caractérisant un accident de travail sont, un fait accidentel, une lésion, un accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail et un lien de causalité entre l’accident et le dommage.
I/ Un fait accidentel soudain
Le premier des trois critères cumulatifs permettant la reconnaissance d’un accident de travail est qu’il faut que la cause à l’origine de cet accident, soit soudain. Ainsi, l’évènement générateur est traditionnellement un fait précis survenu (Cass. 2ème civ., 18 oct. 2005, n°04-30.352).
Pourtant, la soudaineté est perçue de façon très relative : la chambre sociale considère que “constitue un accident de travail un évènement ou une série d’événements survenus à des dates certaines par le fait ou l’occasion du travail” (Cass. Soc., 2 avr. 2003, n°00-21.768).
Cette relativité de la notion de soudaineté s’explique par le fait que la soudaineté est appréciée différemment selon les circonstances. Elle peut porter sur l’événement accidentel ou sur l’apparition de la lésion. Par ailleurs, la soudaineté est également un critère important car elle permet de distinguer l’accident de travail, d’une maladie professionnelle. Pourtant, une affection qualifiée médicalement de maladie peut réunir, selon les situations, les caractères d’un accident. On parle alors de, “maladie accidentelle”.
II/ L’existence d’une lésion
Au-delà de l’existence d’un fait accidentel, la qualification de l’accident de travail passe également par l’existence d’un dommage, d’une lésion.
Traditionnellement, la jurisprudence cherchait une lésion corporelle (Cass. soc., 15 juin 1983, n°82-12.786).Néanmoins s’est à présent développée la notion de risques psycho-sociaux. Ainsi, l’accident peut aujourd’hui aussi résulter d’un traumatisme psychique.
Pour autant, comme précisé dans un arrêt récent (CA de Poitiers, 29 avril 2021, n°18/01412), les juges ne sont pas enclins à reconnaître le harcèlement sexuel comme un accident de travail. En effet, la Cour a rappelé qu’un accident est caractérisé par un évènement soudain, ce qui est incompatible avec un harcèlement sexuel qui est lui constitué par des faits répétés, ce qui a conduit les juges à rejeter la demande de la salariée pour ce seul motif.
Que la lésion soit physique ou psychique, elle doit être constatée par un médecin qui lui seul peut, par un certificat médical, constitué la preuve de la lésion. Néanmoins, si cette lésion résulte d’une faute intentionnelle de la victime, c’est-à-dire réalisée dans une volonté de provoquer le dommage tel qu’il est survenu (Cass., 2ème civ., 1er juillet 2010, n°09-10.590), la lésion n’ouvre droit à aucune prestation (article L.375-1 du CSS).
Attention, cette faute intentionnelle est à distinguer de la faute volontaire (où la victime conscience de commettre une faute mais non dans le but de provoquer le dommage survenu).
III/ Le caractère professionnel de l’accident
Il peut être établi dans deux cas.
• Premièrement, lorsque l’accident survient au temps de travail. Autrement dit, l’accident doit avoir lieu pendant l’horaire de travail, c’est-à-dire pendant le temps où le salarié est sous la subordination de l’employeur (Cass. 2e civ., 17 févr. 2011, n° 09-70.802). La notion de temps de travail est également étendue aux temps de pause et de repas (Cass. soc., 11 juill. 1991, n° 89-18.330).
• Le caractère professionnel de l’accident est établi lorsque deuxièmement, il survient au lieu de travail. On entend ainsi tous les lieux placés sous l’autorité de l’employeur : chantiers, bureaux, ateliers, parcs de stationnements (Cass. soc., 30 nov. 1995, n° 93-14.208). Lorsque le salarié est en mission, le fait que l’accident ait eu lieu dans une discothèque en pleine nuit ne suffit pas à démontrer l’absence de lien avec son activité professionnelle. (Cass. 2e civ., 12 oct. 2017).
Si un accident survient au cours d’une période de suspension du contrat de travail, par exemple en raison d’une maladie, (Cass. soc., 4 oct. 1979, n° 78-13.802) le salarié ne peut pas démontrer que l’accident est survenu au temps et au lieu de travail. Il peut toutefois démontrer que la lésion est survenue par le fait du travail. Il a ainsi été admis qu’une tentative de suicide pendant une période de suspension du contrat de travail était un accident de travail dès lors que le salarié se trouvait en arrêt à la suite de faits de harcèlement moral dont il avait été victime au travail (Cass. 2e civ., 22 févr. 2007, n° 05-13.771).
IV/ Le lien de causalité entre l’accident et le dommage
L’article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale établit une présomption d’imputabilité de l’accident au travail. Concrètement, cette présomption établit un lien de causalité entre l’accident et le préjudice subi par le salarié dès lors que l’accident intervient par le fait ou à l’occasion du travail.
Cette présomption est simple, c’est-à-dire que l’employeur ou la Caisse primaire peuvent l’écarter dans deux cas :
- Lorsque la lésion a une origine totalement étrangère au travail. A ce titre, il a été considéré que la circonstance selon laquelle le salarié soit à l’origine du différend l’ayant opposé à son responsable n’est pas suffisant pour écarter la présomption d’imputabilité et ne permet pas d’identifier une cause totalement étrangère au travail (Cass. 2e civ., 28 janv. 2021, n°19-25.722).
- Lorsque l’accident résulte d’un état pathologique préexistant évoluant en dehors de toute relation avec le travail (Cass. 2e civ., 9 nov. 2017, n° 16-24.678).
Enfin en cas de décès de la victime, seule une autopsie permettra d’établir le lien de causalité entre l’accident et le dommage (CSS, art. L. 442-4).