L’article 853 du Code de procédure civile traite de la représentation devant le Tribunal de commerce. Le Tribunal de commerce est la juridiction compétente pour statuer en matière commerciale en France. La question est donc de savoir, doit-on se faire représenter devant le Tribunal de commerce ? L’article 853 du CPC nous en donne la réponse. Il en ressort que la représentation devant le Tribunal de commerce est de principe, à l’exception des cas prévus par la loi ou le règlement. Enfin le texte précise que « Le représentant, s’il n’est avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial ».
Le principe de la représentation obligatoire devant le Tribunal de Commerce
L’énoncé du principe de l’obligation de représentation
Le législateur pose à l’article 853 du CPC une obligation de se faire représenter devant le Tribunal de Commerce. Il dispose à cet effet que « Les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal de commerce ».
Ce principe est introduit par la réforme du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, entré en vigueur le 1er janvier 2020, modifiant les règles de représentation devant les juridictions commerciales. Avant cette réforme de la procédure civile, les justiciables (demandeur et défendeur) n’avaient pas l’obligation de se faire représenter. Il leur était donc possible d’agir en justice sans être représenté. C’est le principe de la libre représentation. Les parties (commerçants) étaient alors jugées par des juges consulaires (également commerçants).
Avec le décret du 11 décembre 2019, le législateur a choisi d’étendre les règles de représentation devant le tribunal judiciaire (anciennement tribunal de grande instance et tribunal de première instance) aux juridictions consulaires.
Bon à savoir, la constitution d’avocat emporte élection de domicile (Article 853 al. 2 du CPC). Cela signifie que le justiciable qui bénéficie d’une aide juridictionnelle (assistance d’un avocat) est fondé à recevoir une notification d’assignation et autre acte de procédure à lui adresser par le greffe du tribunal,, ou encore signification par voie d’huissier de justice chez son avocat. Ceci durant toute la procédure devant le tribunal de commerce, ainsi que devant le tribunal d’instance, Conseil de prud’hommes, la Cour d’appel, et le Cour de cassation.
Les règles de représentation devant le Tribunal de commerce
L’article 853 al. 3 du CPC dispose que « Le représentant, s’il n’est avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. ». Il faut entendre ici qu’à défaut d’avoir la qualité d’avocat, il faut justifier d’un pouvoir spécial de représentation.
- L’article 416 du CPC dispose que « Quiconque entend représenter ou assister une partie doit justifier qu’il en a reçu le mandat ou la mission. L’avocat est toutefois dispensé d’en justifier. ». C’est dire que devant le Tribunal de commerce, l’avocat n’a pas besoin de justifier d’un mandat pour représenter une partie. C’est le principe du mandat ad litem.
Le mandat ad litem (article 411 du CPC) est un mandat de représentation en justice dont jouit l’avocat et qui l’autorise à accomplir des actes ou prendre des décisions en vue d’un procès au nom du mandant. Les avocats jouissent d’office d’une présomption de mandant ad litem. Il s’agit d’une présomption simple.
- A défaut d’avoir la qualité d’avocat, il faut justifier d’un pouvoir spécial avant toute saisine du juge, pour représenter une partie en justice devant le Tribunal de commerce. Le pouvoir spécial de représentation (articles 416 et 853 du CPC). Le pouvoir spécial de représentation désigne un mandat de représenter et assister une partie dans une affaire précise. L’objet doit donc être spécifique. Le mandat spécial s’oppose au mandat général.
Le mandat général ou pouvoir général de représentation est le pouvoir de représenter et de porter assistance à une partie dans toutes les affaires la concernant, sans limitation d’objets. Le mandat requis dans un litige devant le Tribunal de commerce et un pouvoir spécial de représentation. Ce dernier doit être écrit (mandat écrit) et contenir des mentions obligatoires telles que :
- Les noms et prénoms du mandant ;
- Les noms et prénoms du mandataire ;
- L’objet du mandat qui doit être clairement défini afin que le mandat spécial ne soit requalifié en mandat général.
Le mandat ou procuration est conclu dès acceptation du mandat par le mandataire et peut être donné par acte authentique ou sous seing privé (articles 1984 et 1985 du Code civil).
Les exceptions au principe de l’obligation de représentation
Les exceptions au principe de l’obligation de représentation devant le tribunal de commerce sont également mentionnées à l’article 853 al. 3 du CPC. Le législateur y prévoit quatre types d’exceptions, à savoir :
Les cas de dispense prévus par la loi ou le règlement
Le législateur indique que dans un litige devant le Tribunal de commerce, les parties sont dispensées de l’obligation de constituer un avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement (article 853 al. 3 du CPC) ; et l’article 874 de rajouter que « Les parties sont dispensées de l’obligation de constituer avocat en matière de gage des stocks et de gage sans dépossession. ».
Les litiges dont le montant est inférieur à 10 000 €
Les parties sont dispensées de se faire assister par un avocat durant les audiences dans les cas où le contentieux est d’un montant inférieur à 10 000 €. C’est dire que dans une affaire opposant deux parties, lorsque le montant du litige dépasse les 10 000 €, elles doivent alors se faire assister chacune par un avocat. En principe l’affaire est donc mise en sursis jusqu’à la constitution d’avocat.
Les procédures relatives aux procédures collectives
Le tribunal de commerce est compétent pour connaitre des procédures collectives. Ces dernières désignent toute procédure qui place une entreprise en difficulté financière ou structurelle sous contrôle judiciaire pour organiser le règlement de ses créances. On en distingue 3 types :
- La procédure de sauvegarde ;
- La procédure de redressement judiciaire ;
- La procédure de liquidation judiciaire.
Les entreprises qui sont sous le coup d’une procédure collective sont dispensées de l’obligation de constituer un avocat.
Les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés
Le registre du commerce et des sociétés (RCS) est un fichier qui centralise toutes les informations légales les personnes physiques ou morales ayant la qualité de commerçant en France. Les litiges relatifs à la tenue RCS peuvent être :
- Le non-changement de l’extrait du Kbis à la suite d’un changement survenu dans la vie sociale d’une société commerciale ;
- L’erreur sur l’enregistrement d’une information sur une société commerciale ;
Lorsqu’une entreprise rencontre ce genre de litige au cours de sa vie, le législateur la dispense de l’obligation de se faire représenter ou assister d’un avocat.
Bon à savoir :
Pour ces différents cas, sus-évoqués, le législateur indique que les parties sont libres de se faire assister ou représenter (ou pas) par une personne de leur choix. Il faut toutefois apporter une nuance.
Il ne s’agit pas vraiment d’une représentation libre, car le législateur indique à l’article 414 du CPC que « une partie n’est admise à se faire représenter que par une seule des personnes … habilitées par la loi ». C’est dire donc qu’à défaut de se faire représenter par des professionnels de son entourage ou de son entourage ou son activité, la partie doit obligatoirement se faire représenter par un avocat.