Article 205 du Code civil – L’obligation alimentaire des enfants

6 juin 2023

Article 205 du Code civil - L'obligation alimentaire des enfants

Subvenir aux besoins des membres de la famille est déjà une obligation morale, mais pas uniquement. Le législateur a fait de cette obligation une contrainte légale. L’article 205 du Code civil dispose à cet effet que « Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ». On parle d’obligation alimentaire. Comment comprendre l’obligation alimentaire ? Quel est son champ d’application et comment la mettre en œuvre ?

Qu’est-ce l’obligation alimentaire ?

L’obligation alimentaire désigne pour une personne, l’obligation d’apporter à une autre le secours nécessaire pour vivre.

Au terme de l’article 205 du Code civil, elle se traduit notamment par l’obligation qu’un enfant a d’entretenir son parent. Loin de se limiter uniquement aux besoins alimentaires, le débiteur de l’obligation alimentaire est tenu de fournir tout ce qui relève d’un besoin vital pour le créancier. Il faut entendre par créancier le parent indigent dans le besoin ; et par débiteur, l’enfant sur qui pèse l’obligation alimentaire.

L’obligation alimentaire comporte :

  • Les frais alimentaires ;
  • L’hébergement ou logement ;
  • L’aide-ménagère en cas de maintien à domicile ;
  • Les soins médicaux.

Elle peut s’étendre à la prise en charge des frais d’obsèques. Notons que cette obligation demeure, dans les limites de ses ressources ; et ce, même si le débiteur de l’obligation alimentaire a renoncé à la succession (Cass., civ. 1, 28 janvier 2009, n° 07-14272).

Quel est le champ d’application de l’obligation alimentaire issue de l’article 205 du Code civil?

Si l’article 205 du Code civil se rapporte exclusivement au devoir de soutien des descendants sur les ascendants, en ces termes : « Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin » ; l’obligation alimentaire en tant que telle a un champ d’application plus vaste.

En effet, cette obligation repose sur le lien familial direct ou indirect, entre le créancier de l’obligation et son débiteur.

Ainsi, en surplus de l’article 205 du Code civil, sont également concernés par une obligation alimentaire :

  • Les époux vis-à-vis de leurs enfants (article 203 du Code civil) ;
  • Les gendres et belles-filles vis-à-vis de leur beau-père et belle-mère (article 206 du Code civil).

À noter pour ce cas-ci, que l’obligation alimentaire s’éteint avec la disparition du lien familial indirect (alliance), par un décès ou un divorce. En cas de divorce, l’obligation subsiste durant la procédure de divorce, jusqu’au prononcé de la décision de divorce et en principe demeure tant que le divorce n’est pas prononcé. Si les époux ont divorcé par consentement mutuel ou amiable, ils peuvent eux-mêmes fixer de manière forfaitaire le montant de la pension alimentaire et de la prestation compensatoire.

Bon à savoir, du fait de l’absence d’un lien de filiation, il n’y a pas d’obligation alimentaire entre un concubin et le parent de sa concubine (Cass., civ, 1, 28 mars 2006, n° 04-10684) ; de même qu’entre les enfants d’un premier ménage et le second conjoint de leur auteur (CA Paris, 8e chambre A, 19 mai 1992).

Comment mettre en œuvre l’obligation alimentaire sur le fondement de l’article 205 du Code civil?

L’obligation alimentaire est mise en œuvre par le tribunal. C’est le juge aux affaires familiales qui décide de la mise en œuvre ou pas d’une obligation alimentaire. Il fixe le montant de la pension alimentaire.

Pour ce faire, il examine deux situations :

  • l’état d’indigent du parent (père, mère, grands-parents) ;
  • et la capacité contributive de l’enfant (fils, fille, petits-enfants).

L’examen de l’état d’indigence du parent consiste à établir les besoins du parent. Ce dernier doit prouver au JAF qu’il est dans une situation de besoin. Le juge va alors tenir compte de son âge, son sexe, son état de santé et de son niveau de vie. Le parent qui demande le bénéfice de l’obligation alimentaire doit apporter la preuve de l’insuffisance de ses revenus (salaire, indemnité de chômage, prestations familiales, etc.).

L’examen de la capacité contributive de l’enfant permet de déterminer si ce dernier dispose de suffisamment de revenus pour supporter la charge d’une obligation alimentaire, tout en maintenant au moins acceptable son propre niveau de vie et celui de sa famille. L’obligation alimentaire est mise en œuvre dès lors qu’il y a un excédent sur le revenu de l’enfant, toutes charges déduites.

Bon à savoir, pour bénéficier d’une obligation alimentaire, un parent peut agir contre chacun de ses enfants, indifféremment d’un ordre déterminé (Cass., civ. 1, 25 avril 2007, n° 06-12614). Les enfants ne sont pas tenus solidairement responsables de la dette alimentaire. L’action relative à l’obligation alimentaire est personnelle et chacun des enfants sera engagé en fonction de ses propres capacités. L’enfant qui aura payé plus que ce qu’il doit pour l’entretien de ses parents, dispose d’un recours contre ses coobligés pour le remboursement de l’excédent payé.

Quelles sont les modalités d’exécution de l’obligation alimentaire ?

L’obligation alimentaire peut être versée en espèce par le paiement d’une pension alimentaire, ou en nature par la fourniture du repas, du logement au créancier ou encore son habillement (Art. 210 du Code civil).

L’obligation alimentaire est d’ordre public, elle ne peut faire l’objet de renonciation ni de cession. Elle peut toutefois être suspendue en partie ou totalement si le parent a tenu une conduite particulièrement déplacée à l’égard de l’enfant (Art. 207 alinéa 2 du C. civ).

À noter que, en vertu de l’article 207 alinéa 2 du Code civil, le tribunal de grande instance peut affranchir l’enfant de son obligation de alimentaire à l’égard de son parent créancier, lorsque celui-ci a tenu un comportement gravement fautif (alcoolisme, délaissement, divers mauvais traitements) à l’égard de son enfant jadis mineur (Cass., civ., 1, 18 janvier 2007, n° 06-10833). La doctrine qualifie cette situation d’exception d’indignité.

Bon à savoir, en cas de non-respect de l’obligation alimentaire pendant plus de deux mois, le bénéficiaire peut saisir un huissier de justice en vue du recouvrement ou exécution forcée de la créance. Il peut également saisir le juge et le débiteur fautif encourt une peine de deux ans de prison et de 15.000 € d’amende. L’exécution peut aller jusqu’à la saisie de salaire ou de compte bancaire.

D’un point de vue fiscal, le parent bénéficiaire de l’obligation alimentaire doit la mentionner dans sa déclaration de revenus.

Elle est assimilable à une pension retraite, sous déduction d’un abattement de 10% plafonné. L’enfant sur qui pèse l’obligation doit en fournir les justificatifs de versement. Les pensions alimentaires sont déductibles. Elles ne font pas partie du revenu imposable.

Comment prend fin l’obligation alimentaire ?

L’obligation alimentaire peut prendre fin sur décision de justice. Plusieurs incidents peuvent être à l’origine de la fin de l’obligation alimentaire :

  • Lorsque l’enfant n’a plus les moyens de supporter l’obligation (Art. 209 C. civ), soit à la suite d’un licenciement.
  • Lorsque le parent n’est plus dans le besoin, soit à la suite d’une embauche (Cass., civ. 2, 2 décembre 1987, Bull. civ. II n° 257), ou d’une augmentation d’allocations.
  • Le décès du parent. L’obligation alimentaire n’est pas cessible aux héritiers du défunt.

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